Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 12 juin 2016

PES n° 24 est sorti


Au sommaire 

l'édito (ci-dessous)  Rien ne sera plus tout à fait comme avant
La gangrène autrichienne
Eclairages sur le mouvement social
Y'a trop d'étrangers dans le monde
A l'encontre du capitalisme : l'autogestion (suite)
Ils, elles luttent
Nous avons lu
et le poème d'Hassen (ci-dessous)

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Rien ne sera plus tout à fait comme avant

Du moins peut-on le supposer. En effet, quelle que soit l’issue du mouvement social contre la loi El Khomri (d’abaissement des normes sociales par accord forcé d’entreprise passé sous la forme d’un chantage à l’emploi), la guérilla gréviste a déjà obtenu une victoire morale. La combativité d’un noyau dur de cégetistes, de sudistes, renforcés principalement par FO, a été longuement approuvée par l’opinion publique. Malgré les insultes, les calomnies, la répression, le mouvement a perduré, sautant d’une mobilisation à une autre jusqu’y compris celles des éboueurs et peut-être, à l’heure où s’écrivent ces lignes, des pilotes d’Air France. Les coups de gueule du matamore Valls, le recours à la phrase de Thorez « Il faut savoir arrêter une grève » ou, plus récemment, « Il ne faut pas que les minoritaires gauchistes salissent l’image de la France », rien n’y fait. Il est encore trop tôt pour savoir ce qu’il en sera de la grande manif prévue le 14 juin prochain. Mais…

Une brèche est ouverte : l’aspiration à la démocratie réelle contre les décisions prises en notre nom. Et ce fut Nuit Debout, cette volonté de débattre de l’avenir et même celle qui n’a pu se concrétiser, d’occuper les places symboliques du pouvoir face à la répression.

De ces deux composantes, une nouvelle génération semble avoir émergé. Qu’en sera-t-il demain ? Nul ne peut véritablement le prévoir car, pour l’heure, elles ne se sont pas agrégées en termes d’alternative politique à promouvoir et elles n’ont pu rallier la masse des précaires et des chômeurs.

Il n’empêche. Le Berger de la CFDT est apparu comme la courroie de transmission du gouvernement social-libéral, se prêtant à toutes les manœuvres d’étouffement, notamment celle concernant la mobilisation cheminote. La compassion vis-à-vis des sinistrés des inondations, d’une hypocrisie sans nom puisque les crédits d’aménagement des berges ont été réduits de 40%, les revalorisations salariales des fonctionnaires, des enseignants... puis le recul précipité sur la réduction des crédits des chercheurs, se sont, de fait, traduits par une impopularité croissante de Valls/hollande. Et même la macronite s’est dégonflée.

Les sociaux-libéraux complexés sont à la dérive, divisés et même tétanisés. Le PCF, après avoir contribué largement à casser le Front de gauche, est fracturé. Quant aux Verts d’EELV, ils sont en lambeaux. Les leaders de la Droite ne sont pas en meilleure forme ; les luttes intestines sans fin les traversant ont de beaux jours devant elles. Et on leur souhaite bien du plaisir pour mettre en oeuvre leurs programmes de surenchères ultralibérales.

L’euro-foot lui-même et tout le battage médiatique n’ont pas réussi à calmer les ardeurs revendicatives. Ces jeux pour étouffer les enjeux, s’ils parviennent à circonscrire momentanément l’aspiration à une autre société, ne résoudront rien tout, comme le cirque électoral qui s’en suivra. Reste que les forces dominantes, y compris le FN, sont désormais sur la défensive. Il faut qu’il y demeure d’autant que l’Europe austéritaire peut désormais se défaire. Brexit, désaccords sur le CETA et le TAFTA, d’autres crises sont à venir… Et pas toujours dans le sens souhaité.


Le 9.06.2016   
Y’ a trop d’étrangers dans le monde(1)

Nous avons évoqué, dans le dernier numéro, l’incapacité de l’Union Européenne à répondre aux impératifs d’accueil et de protection internationale des personnes en migration, déléguant cette mission à la Turquie, pour « débarrasser » le territoire européen. Cela a abouti à un marchandage avec Erdogan pour 6 milliards d’euros et la promesse d’exemption de visas pour les Turcs entrant dans l’espace Schengen. Il nous semble important de revenir sur ce sujet car le contrat imaginé par Merkel/Erdogan ne fonctionne pas. Pourquoi ? Ce qui est certain c’est que si L’Europe est inefficace pour accueillir, elle est audacieuse dans l’exercice du contrôle pour empêcher les exilés d’entrer en UE, les Etats membres ayant, de surcroît, une imagination débordante pour fermer leurs frontières. Et même si des voix s’élèvent localement, nationalement et au niveau européen pour dénoncer cette politique, les exilés sont comme enfermés hors de l’UE ou enfermés dans l’Europe qui les parque aux frontières ou dans des camps.    

Tout d’abord, un petit détour par les mots

Albert Camus disait : «Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde ». Est-ce lui qui a inspiré Jacques Toubon prônant la vigilance dans l’emploi des mots, jamais neutres ? En tout cas, le défenseur des droits qu’il est devenu – avouons-le, au regard de son passé politique, il nous surprend dans ses déclarations… Sans doute s’appuie-t-il sur le travail de recherche de la Coordination des Sans-papiers de Paris(1) démontrant que les mots « migrant », « réfugié » « demandeur d’asile », « exilé », « sans-papiers », « étranger », « immigré », « débouté », « clandestin » sont lourds de sens. « Migrant » a longtemps été vu comme le plus neutre, face notamment à « clandestin » utilisé par les mouvements anti-immigration et l’extrême droite : le FN parle de « clandestins » ou de « déboutés » du droit d’asile pour souligner l’irrégularité du séjour. Le mot « migrant », quant à lui, a de plus en plus souvent une acception négative dans le sens où il est assimilé à migrant « économique », lui déniant ainsi un droit à la protection. Il est surtout utilisé par l’administration et le ministère de l’intérieur. Le terme « réfugié » est aussi piégé, car il y aurait le « bon » réfugié et le « mauvais » migrant économique. Alors même que cette distinction n’a pas de sens, affirme J. Toubon, « les raisons de la migration étant souvent entremêlées, particulièrement en cas de fuites de sociétés verrouillées, tenues par des régimes autoritaires ne laissant aucune perspective d’avenir ». Les militants usent plutôt  du terme « sans-papier ». Reste, celui qui nous semble bien adapté, « exilé », car il exprime bien la situation de toute personne qui a « volontairement ou non, quitté sa patrie, sous la contrainte d’un bannissement ou d’une déportation, dans l’impossibilité de survivre ou sous la menace d’une persécution ». 

Ceci étant dit, nous constatons que les exilés sont de plus en plus nombreux à quitter leurs pays en guerre ou dirigés par des dictateurs ou encore poussés par la misère. Face à ça, la politique européenne qui se répand n’est  pas celle qui organise l’accueil, mais c’est celle du rejet.

L’Union Européenne refoule les exilés

L’accord « Merkel » UE/Turquie, à peine mis en œuvre depuis le 20 mars, est bloqué. Ce « pacte de la honte »(2) consiste à renvoyer du territoire européen vers la Turquie, tout exilé, arrivé irrégulièrement après le 20 mars en Grèce. En contrepartie du Syrien renvoyé en Turquie, un autre serait réinstallé dans un pays de l’UE, dans la limite de 72 000 places ! Quand on sait que pour la seule Syrie, sur 22 millions d’habitants, 11 millions sont déplacés  (à l’intérieur du pays et à l’extérieur), on ne peut que constater que l’effort n’est pas à hauteur de l’histoire.

C’est au compte-gouttes que les « relocalisations » ou « réinstallations » ont commencé. Sur les 8 500 exilés arrivés après le 20 mars, seuls 400 ont été renvoyés en Turquie ; les 202 premiers refoulés (Afghans, Pakistanais, Bengladhais, Africains) ont été embarqués de force, sans avoir pu déposer une demande d’asile. Au 28 mai, ils sont enfermés au centre de rétention de Pelhivanköy entre Istanbul et Edirne. C’est une prison, sans le statut de prison, et, donc, sans les droits subséquents : une jeune avocate d’Izmir dénonce cette réalité ainsi que l’absence des institutions européennes pour exiger des règles de fonctionnement permettant aux détenus de pouvoir écrire, d’avoir accès aux avocats... Une autre jeune avocate américaine a créé un réseau d’entraide Advocates Abroad, où 90 experts proposent une aide juridique gratuite aux exilés, ce réseau oeuvre en Grèce pour établir les demandes d’asile. Là encore, faute de moyens à la hauteur, sur 600 Syriens qui ont demandé l’asile depuis le 20 mars, seuls 33% ont reçu une réponse positive de la Grèce.

Point besoin d’aller plus loin pour comprendre que l’accord UE/Turquie est inefficace d’autant que Les routes de l’exil s’adaptent aux contraintes qu’elles rencontrent. En conséquence, les exilés refusant de subir cette politique de tri et de troc d’êtres humains, prennent une autre route. La route des Balkans se tarit : en avril 3 360 arrivées contre 26 971 en mars, 57 066 en février et 67 415 en janvier. Elle est remplacée par la route de l’Adriatique (Libye-Italie).  En Italie, 40 000 migrants sont arrivés entre janvier et fin mai et ce sont déjà près de 700 migrants noyés en 3 jours (entre le 23 et le 26 mai) au large de la Libye.

Et voilà qu’Erdogan veut bien le beurre et l’argent du beurre pour faire le tri des migrants, mais pas les contraintes formulées par l’Europe : il refuse, notamment, de modifier sa loi antiterroriste, l’une des 5 dernières des 72 conditions prévues dans le texte signé avec Bruxelles. Le 6 mai, Erdogan, affirmait « L’UE nous demande de modifier la loi sur le terrorisme. Les visas seront abolis à cette condition, c’est ce qu’ils disent. Désolé, allez votre chemin, nous suivrons le nôtre. Entendez-vous avec qui vous pouvez… ». Peut-on faire semblant de s’étonner de cette réaction autoritaire alors que l’on sait qu’Erdogan met en prison les journalistes, les opposants, et notamment ceux qui sont accusés de soutenir le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan). Il vient d’accuser 49 des 59 députés du Parti démocratique des peuples (HDP) pro-kurde. Il est en passe de lever l’immunité parlementaire de 116 députés, sur les 550 du Parlement.

L’Europe est faible, Erdogan se sent fort car l’UE a besoin de lui, qui accueille près de 3 millions de Syriens. Merkel a intérêt à ce que l’accord fonctionne, sinon les exilés arriveront en Europe et en Allemagne, ce qui n’est pas du goût de ses opposants politiques. Qui va emporter ce bras de fer ? Sûrement pas ceux qui survivent dans les camps en Europe ou à ses portes.

Les Etas européens n’en veulent plus ou très peu

Les exilés arrivent en Europe. Les renvoyer ? ça ne marche pas. Ne pas les laisser entrer ? ça ne marche pas. Où sont-ils ?

En Grèce, à Idomeni, à la frontière macédonienne. Le gouvernement grec est en train d’évacuer ce camp pour les transférer vers des usines désaffectées aux alentours de Thessalonique. Sur les 8 400 personnes, 2 031 ont été emmenés en bus ailleurs qu’à Idomeni : ce sont 662 Syriens, 1 273 Kurdes (syriens, irakiens et turcs) et 96 Yézidis.

Il en reste encore plus de 54 000 bloqués, répartis en une trentaine de camps en Grèce continentale, espérant ne pas être refoulés en Turquie et pouvoir déposer une demande d’asile en Grèce. Près de 25 000 seraient éligibles à la « relocalisation » mais les moyens des administrations grecques sont largement insuffisants pour recevoir les demandeurs, l’UE n’a pas envoyé les renforts rapides en personnels spécialisés. Les exilés sont donc voués à y rester de longs mois dans l’attente de la volonté turque, et ce, jusqu’à l’automne, la décision concernant l’accord sur les visas turcs étant repoussée à cette date.

Ailleurs, les frontières de l’Europe se sont fermées.
En Hongrie, Victor Orban, le 1er ministre, fait fabriquer des kilomètres de fils de fer barbelés par ses prisonniers pour prolonger sa clôture en barbelés existante le long de la frontière avec la Serbie et la Croatie, jusqu’à la frontière roumaine.

En Suède, non seulement les exilés n’arrivent plus mais ils partent. Le pays européen le plus généreux en matière d’accueil, a durci ses conditions d’accueil pour décourager les candidats : de 162 877 accueillis en 2015, le nombre a chuté à 11 232 de janvier à fin avril 2016. Le gouvernement « de gauche » a rétabli les contrôles aux frontières et a durci les droits des réfugiés ! Près de 60% des 32 500 dossiers examinés en 2016 ont reçu des réponses négatives ou sont en attente. Irakiens et Afghans sont les deux nationalités les plus présentes en Suède : l’Office des migrations considère l’Irak et l’Afghanistan comme deux pays où la réinstallation est possible et des aides au retour sont proposées. Désormais, les flux s’inversent, il y a plus de retour dans ces deux pays que d’arrivée d’exilés en Suède.
En France, le gouvernement Valls/Cazeneuve, « fait de la place » et organise les retours par avions spécialisés des exilés, sans statuts, sous OQTF assorties (selon les préfets plus ou moins zélés) d’assignations à résidence ; ces « procédures » permettent aux préfets, au moment où ils le décident, de « remplir » les avions sur la base d’une plate-forme nationale mise à jour régulièrement. La mode Vichy est revenue. Sont concernés, plus particulièrement en ce moment, les Albanais et les Kosovars. La politique mise en œuvre semble très brouillonne et est plus ou moins efficace ; en effet, certains ont « la chance » de pouvoir refuser de monter dans un avion, d’autres (comme notre ami Kozma) n’ont pas eu cette possibilité : Kozma a été emmené de force, contraint et menotté, il a été embarqué, sans avoir eu le temps de rencontrer le juge des libertés, sans que son recours contre la rétention à Metz ait eu le temps de parvenir au Tribunal administratif. Non, l’avion était prêt ! Il est à Tirana, seul, son épouse Shkendi et ses deux enfants Dasantil et Ami sont en France, totalement anéantis, malades d’angoisse, de peur… Des soutiens se lèvent partout mais ne suffisent pas pour contraindre les préfets à exercer leur pouvoir discrétionnaire de régularisation, même si les familles vivent dans nos villes et nos villages, totalement insérées dans la vie locale, scolaire depuis plusieurs années… (encart « les Charter Awards »)

Les exilés, en France, depuis plusieurs années, sont soumis à de fortes pressions et intimidations : ils doivent laisser les places pour les « vrais migrants ». Libérées, ces places ne sont pas pour autant occupées par des Syriens. Ceux-ci sont en attente en Grèce ou en Turquie où ils sont parqués et… ils n’arrivent pas.

Mais il ne s’agit pas de virer certains « faux » migrants pour accueillir des « vrais » migrants. Ce discours xénophobe et raciste, employé par les anti-immigrés, l’extrême droite, est aussi celui des autorités préfectorales vis-à-vis de ceux qui n’ont pas obtenu le statut de réfugié ! Discours repris dans les médias, offrant aux habitants quelquefois excédés par les conséquences de l’entassement d’êtres humains qui n’ont rien à manger, rien pour se mettre à l’abri…

Il existe quand même des maires « courageux », notamment à Grande Synthe : Damien Carême, a tenu bon car il a dû se battre, contre sa majorité politique au gouvernement, pour réussir à ouvrir le camp de la Linière, un campement humanitaire aux normes internationales, grâce au financement notamment de Médecins sans frontières. Après nombre de refus, puis de contrôles tatillons, puis de « bouderies » des services de l’OFPRA, convocation du maire devant les services de la préfecture… les petits cabanons ont été construits et habités. Un bel exemple de volonté politique assumée ! Et voici que… 6 mois plus tard, l’Etat suggère de gérer le dispositif… mais les bénévoles ne sont pas pour autant rassurés « Reste à savoir si l’Etat ne démontera pas les bungalows à chaque départ de famille, pour vicieusement fermer les lieux ». Voilà le résultat de la politique de Hollande : perte de confiance totale ! Et on le comprend…

Car il faut s’inquiéter des politiques de l’UE

Depuis 2004, Frontex, agence européenne chargée de coordonner la gestion du contrôle aux frontières extérieures de l’UE, a vu ses compétences augmenter constamment : déploiement de contingents d’action rapide (2007), administration du système de surveillance des frontières EUROSUR (2012), possibilité d’intercepter des personnes en mer et de les débarquer  hors de l’UE (2014), multiplication du budget par 13 en 10 ans.

Le 30 mai 2016, la commission Libertés Civiles, Justice et Affaires Intérieures (LIBE) du Parlement européen a donné son accord pour le remplacement de Frontex par un corps de garde-frontières et de garde-côtes européen. Version renforcée de l’agence Frontex à l’abri de tout contrôle indépendant, sans mécanisme efficace permettant de mettre en cause sa responsabilité en cas de violation des droits humains, mais dotée de plus de pouvoirs. Une campagne Frontexit a été entreprise par des associations, des chercheurs et des individus issus de la société civile du Nord et du Sud de la Méditerranée à l’initiative du réseau Migreurop : on y trouve nombre d’associations du Maroc, Mauritanie, Mali, Italie, Belgique, Sénégal et pour la France : la CIMADE, la FASTI, le GISTI ainsi que des réseaux internationaux (FIDH, Euromed droits…) (5)

Malgré les nombreuses critiques relatives aux risques de violations des droits, y compris celles émises par les Nations Unies ou les instances européennes de défense des droits, l’UE maintient sa politique et assure à l’agence une impunité qui contraste avec sa croissante capacité d’action et de déploiement. La « nouvelle » agence renforcera la logique sécuritaire avec des moyens techniques quasi-militaires (satellites, radars, hélicoptères, possibilité d’usage de drones,) sans quasiment aucun contrôle.
Il y a des raisons de s’inquiéter :
-        Sur l’impunité et l’irresponsabilité de Frontex : les eurodéputés ont fait valoir l’inclusion d’un mécanisme de plainte mais c’est une coquille vide : la responsabilité juridique de l’agence ne peut être engagée devant une instance indépendante, malgré des cas avérés de violations des droits durant ses opérations et alors que les activités de l’agence en mer permettent, selon la Cour de Justice Européenne « des ingérences dans les droits fondamentaux des personnes ».
-        Sur les amalgames réducteurs et hostiles : en novembre 2015, le Conseil de l’UE annonçait que Frontex contribuerait à la lutte anti-terroriste, alimentant ainsi la méfiance envers les personnes migrantes, assimilées à des terroristes, ce qui attise les sentiments xénophobes et racistes au sein de l’opinion publique.
-        Sur le déploiement accru hors Europe : Frontex peut signer des accords « techniques » avec des pays hors UE et, depuis 2011, y déployer des officiers de liaison. Cette coopération s’accompagne d’échange de données afin d’analyser les « risques » et les routes migratoires. Ces actions peuvent porter atteinte au droit à quitter tout pays, au droit d’asile ainsi qu’à l’obligation de non-refoulement, sans aucun contrôle des parlements nationaux. 18 accords sont déjà signés. Des données sont échangées avec plus de 40 pays, bafouant les droits humains.
-        Sur les risques de refoulements en chaîne : le mandat permettra à la nouvelle agence de faciliter les expulsions des personnes faisant l’objet d’une OQTF, émise par un Etat signataire de la Convention  européenne des Droits de l’Homme. Concrètement, l’agence sera habilitée à renvoyer des personnes depuis des pays comme la Serbie, ou encore la Turquie, sur la base d’un ordre d’expulsion ne répondant pas au standard européen, et sans garanties que ces personnes ne soient pas soumises à des traitements inhumains et dégradants dans le pays de renvoi.  

L’Europe se barricade et tente de mettre à distance celles et ceux qu’elle identifie à tort comme une menace : des hommes, des femmes et des enfants qui tentent de fuir la guerre, la persécution et la misère. Les organisations membres de Frontexit demandent que l’agence ne soit pas renforcée mais supprimée.    


« Alors que la seule question devrait être : comment assurer un accueil humanitaire et une protection à tous ceux qui le demandent et en ont besoin, nos pays semblent ne s’accorder que sur : comment éloigner le problème, s’en débarrasser au plus vite, en empêchant les exilés d’aborder le continent européen par une militarisation accrue des frontières extérieures. S’en débarrasser nationalement en fermant les frontières intérieures ou en les  renvoyant dans un pays aussi peu « sûr » que la Turquie !
…Que reste-t-il des valeurs humanistes de nos pays alors même que le Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme s’inquiète, aux frontières européennes, « d’un risque réel de négligence des obligations liées au respect des droits de l’Homme » ? … Dans ce contexte d’une Europe qui semble avoir perdu la boussole, nous déplorons que la France n’ait pas apporté de réponses fortes et courageuses à la hauteur des enjeux. Elle n’a contribué que très peu en matière d’accueil… mais elle réagit en durcissant sa politique nationale, en contrôlant, en éloignant des personnes migrantes.
Le temps est à la résistance : l’urgence est d’alerter sur ces dérives, de revendiquer l’hospitalité plutôt que l’hostilité ou la peur. Démontrer concrètement que la solidarité est le meilleur rempart contre la xénophobie… De très nombreux citoyens adhèrent à cet esprit de résistance aujourd’hui et construisent des alternatives sociales. Notre gouvernement ferait bien d’en tenir compte ». Geneviève Jacques et Jean-Claude Mas, président et SG de la Cimade, le 9 mai 2016 (extraits)
 
«  Le droit se meurt »(6) : le droit d’asile et, au-delà, la liberté de migrer, sont en danger.

Odile Mangeot
Le 1.06.2016

(1)    C’est le titre d’un petit fascicule illustré du racisme ordinaire, dessiné par Dédé, Lèbre et Véesse (1997)
(2)    La Croix du 9 mai 2016
(3)    Cf PES n° 23 (p. 9)
(4)    Toutes ces informations et celles qui suivent sont extraites du blog de la Cimade
(5)    FASTI : fédération de solidarité avec les travailleurs immigrés ; CIMADE : association de solidarité active avec les étrangers ; GISTI : groupe d’information et de soutien des immigrés ; FIDH : Fédération internationale des Droits de l’Homme
(6)    En référence à la conférence-théâtre d’Alain Bressy « le droit se meurt » au Bar Atteint le 20 mai dernier, organisé par les Amis de l’Emancipation Sociale et les Amis du Monde Diplomatique Nord Franche-Comté (cf ledroitsemeurt.jimdo.com) 


Les « Charter Awards »

Parodiant les Music Awards, la Cimade et ses partenaires : Resf, Médecins du monde, Emmaüs, Gisti, ont organisé le 7 juin à la maison des métallos à Paris, la remise des prix, les « Charter Awards » pour récompenser les préfectures les plus « imaginatives » ayant mis en œuvre, en 2015, des « pratiques illégales ou abusives », reconnues comme tel par les juges. Sur les 15 nominées, 9 sont sorties de l’enveloppe, huées copieusement à chaque fois par une salle pleine de militants des droits de l’homme. N° 1 : la préfecture du Pas-de-Calais qui a décroché le prix « Retour en enfer » pour avoir renvoyé le 24 septembre, deux Soudanais du Darfour vers Khartoum et le prix « Tarzan, roi de la jungle » pour avoir « déplacé de force par avion et par bus, 1 200 personnes pour les disperser en les enfermant illégalement dans 7 centres de rétention ». La Gironde a reçu le prix « 48 H chrono » pour sa capacité à expulser sans attendre la réponse du juge. La Haute-Garonne, quant à elle, était récompensée pour sa capacité à séparer les familles envoyées en rétention administrative et gagnant le prix « Maman, j’ai raté l’avion ». La Seine-Saint-Denis, le Doubs, la Vienne, la Guyane, la Guadeloupe, la Loire-Atlantique ont aussi été honorés. La Haute-Saône n’a pas fait assez d’efforts et a raté la marche en 2015…   
1er mai 1916 : contre la guerre à Berlin

En pleine guerre, il y a cent ans, une manifestation ouvrière fut organisée à Berlin pour dénoncer le massacre et affirmer l’idéal socialiste.

En effet, quand la guerre avait été déclarée en août 1914, les dirigeants des deux grands partis ouvriers socialistes allemand et français, s’étaient ralliés à l’union sacrée derrière leurs gouvernements respectifs, livrant ainsi de fait, travailleurs et militants à la pression de la vague chauvine… et aux appareils militaires les envoyant s’entretuer sur les champs de bataille.

En Allemagne, seul un petit nombre de militants avait refusé cette capitulation, dont Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht, seul député en décembre 1914 à refuser de voter les crédits militaires (1). Mais les conséquences et la réalité sordide de la guerre commencèrent à modifier l’opinion ouvrière et, dès la fin de l’année 1915, des manifestations éclatèrent contre la cherté de la vie, malgré la censure et la propagande. Et fin avril 1916, Liebknecht et ses camarades diffusèrent des tracts appelant à manifester :

« Travailleurs, camarades, femmes du peuple, ne laissez pas passer ce deuxième 1er mai de la guerre mondiale sans en faire une manifestation du socialisme international, une protestation contre le massacre impérialiste ».

Le 1er mai, sur la Postdamer Platz à Berlin, remplie de policiers à cheval et à pied, des milliers de jeunes et ouvriers se rassemblèrent autour de Karl Liebknecht. Il faut immédiatement arrêté quand il proclama
« A bas la guerre ! A bas le gouvernement ».
Toute la soirée, les manifestations continuèrent au cri de « Vive Liebknecht ».

55 000 ouvriers des usines de guerre berlinoises se mirent en grève quand il fut traduit en justice en juin. Il fut condamné à 4 ans de forteresse mais sa popularité atteindra les tranchées.
En novembre 1916, la révolution allemande éclatera. A son procès, Liebknecht dénonça
« Je suis ici pour accuser et non pour me défendre »
« Le 1er mai et une manifestation pour la paix et contre la guerre !! »

Bernard Marion


(1)    En septembre 1915, un an après le début de la 1ère guerre mondiale, les militants socialistes, restés fidèles à l’internationalisme, avaient tenu une première conférence à Zimmerwald (Suisse) proclamant alors leur opposition à la politique d’union sacrée avec les gouvernements impérialistes, menée par la 2ème Internationale.
Nécessité

Nos besoins dans la vie
Riment avec écologie
Ce symbole de l’esprit
Provenant d’une profonde philosophie
Nous émanons tous de cette source infinie
Nos racines sont ainsi
C’est là que naît la vie
De laquelle nous faisons partie
Retrouve le cœur de ton jardin fleuri
C’est là qu’est le chemin
De l’amour, des envies
Notre état de santé dépend du sien
C’est garanti
Assurons l’équilibre socio-environnemental
C’est vital.

Hassen