Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 29 juin 2015

Hémorragies dans les grands hôpitaux publics.

La presse s’est fait l’écho des saignées qui continuent d’anesthésier les hôpitaux publics. On voudrait, ici, y revenir tout en insistant sur la nature austéritaire de la politique du gouvernement Hollande, n’agissant que sous la pression de la commission européenne et du Conseil Européen des chefs d’Etat et de gouvernement, auquel il participe.

Les hôpitaux de Paris – AP-HP

L’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, ce sont 38 hôpitaux. La question qui se pose au pouvoir, c’est comment parvenir à supprimer en 5 ans, 4 000 emplois, alors même que les médecins surchargés demandent plus de temps libre, refusent les restrictions de dépenses et que les « jeunes ne sont pas prêts à flinguer leur vie de famille ». D’autant que le manque d’effectifs est flagrant, les agents ne peuvent pas prendre leurs RTT, les cumulent sur leur compte-épargne-temps. Le pouvoir, Marisol Touraine en tête, va faire appel à un humanitaire bon teint : Martin Hirsch, comme directeur, usant d’une méthode insidieuse susceptible de diviser les syndicats et les personnels ; il lance le 6 mai dernier, une discussion pour « revisiter les 35 heures ». Il s’agit, en fait, d’augmenter le temps de travail, sans les récupérations possibles, des 75 000 salariés paramédicaux et administratifs qui font parfois… plus de 60 heures par semaine. La suppression de 5 jours de RTT, « tout en respectant le cadre réglementaire » !!!  serait susceptible d’alléger cette usine à soins qui fonctionne à flux tendus.

Cette manœuvre, bien que contestée lors de la journée de mobilisation du 21 mai, va plus ou moins fonctionner. Les médecins, ressource rare, vont imposer leurs conditions en faisant peser les « efforts » sur les précaires, les intérimaires et les paramédicaux. Les urgentistes obtiennent, à partir du 1er juillet, les 39 heures ( !), les dépassements d’horaires étant récupérés ou payés. La simple menace de grève a suffi, les 4 500 anesthésistes réanimateurs, dindons de la farce ( !) demandent à bénéficier de ces changements. Le malaise et les divisons persistent… d’autant qu’une directive européenne non appliquée, interdit aux internes de travailler plus de 48 heures par semaine.

L’Assistance Publique et Hôpitaux de Marseille

JJ Romatet avait été nommé directeur, avec l’objectif « d’économiser 86 millions d’euros sur 4 ans ». Il voulait créer un véritable électrochoc en s’attaquant… (seulement) au clientélisme de recrutement. Faut dire qu’au sein du cabinet du Maire de Marseille, était institué un véritable bureau d’embauche. Fin mars, plein de zèle, le directeur procédait, suite au conseil de discipline, à des radiations pour incompétence. Cela ne réglait pas, bien évidemment, le milliard d’euros de dette, dont 21% sont constituées d’emprunts toxiques, et n’entamait qu’à peine les 40 milliards d’euros de déficit annuel. Et permettait encore moins de rénover l’hôpital (50 millions d’euros) qui, depuis 1974, alors qu’il était considéré comme le plus bel établissement européen selon les dires de certains, n’avait connu aucun entretien ni réhabilitation.

Limogé, le directeur fut remplacé par la dénommée Catherine Geindre. Elle promit du sang et des larmes et … l’interdiction de geindre : 500 à 1 000 (!) emplois sur les 15 000 agents doivent être supprimés alors qu’ils sont déjà victimes de burnout ! Les syndicats ont promis la mobilisation générale sous forme d’Etats Généraux. 17989 à l’hôpital ?

Ces deux exemples significatifs s’inscrivent dans un plan de restriction budgétaire de 3 milliards d’euros sur 3 ans, avec la suppression de lits y afférente. Et la Marisol Touraine, d’annoncer sans rire que « ces efforts se feront à effectifs constants ». D’ailleurs les Agences Régionales de Santé ont reçu pour instruction de procéder à des saignées drastiques. A la manière du médecin de Molière ? 860 millions de réduction sur les salaires, les régions les plus touchées étant Rhône-Alpes, le Nord Pas-de-Calais (33 millions), la Région PACA (35 millions) et l’Ile-de-France (111 millions). Quant au nombre de lits supprimés, il devrait correspondre à 1 milliard « d’économies ».

                        …/…
Après les déserts médicaux en ruralité, l’hécatombe risque de se poursuivre dans les grandes agglomérations pour le plus grand bénéfice des cliniques privées qui y trouveront des niches rentables, tout en facilitant une médecine à deux vitesses. Quant à ceux qui veulent encore croire au caractère social de ce gouvernement et à la possibilité de le faire changer d’avis, l’admonestation de Bruxelles et la réponse fournie devraient, en toute rationalité ( !), leur déciller les yeux.

La Commission Européenne, en accord avec les orientations promues par le Conseil Européen des chefs d’Etat et de gouvernement -  on  ne dit jamais assez cette réalité camouflée de qui compose le Conseil Européen !), insiste pour que « les mesures promises soient mises en œuvre » : la loi sur les « seuils sociaux » pour supprimer le nombre de représentants du personnel, les « réformes » sur les « retraites complémentaires » trop « généreuses », la « réforme » des professions réglementées, le marché du travail pas assez « flexible »… Mais que font Valls et Macron ? Pour toute réponse, Bercy s’est engagé à dégager… 4 milliards d’économies supplémentaires pour 2015… Encore des saignées !

Gérard Deneux le 27.06.205


Quand les Socialos 
veulent supprimer le droit de manifester.
Noël Mamère piégé !

Cette information n’a guère été médiatisée. Et pourtant, la mort de Rémi Fraisse, tué par une grenade offensive à Sivens, avait provoqué bien des polémiques sur la nécessité de « mieux encadrer le travail » des forces répressives. Noël Mamère avait donc, avec d’autres, demandé qu’une commission d’enquête parlementaire puisse préconiser des mesures plus respectueuses du droit de manifester. Il s’est donc embarqué dans une drôle de galère, lui, promu Président de cette commission.

« Je suis tombé dans un piège », finit-il par reconnaître. En effet, les députés composant l’aéropage de cette instance, mis à part Marie-Georges Buffet et lui-même, avaient pour seul objectif la limitation du droit de manifester. Des 23 recommandations qu’ils édictèrent, il faut surtout retenir l’interdiction administrative de manifester, leur opposition à l’interdiction du flashball et cette déclaration du rapporteur « socialiste », Pascal Popelin de Seine St-Denis : « la liberté de manifester n’est pas la liberté de casser des vitrines »… en plein champ à Sivens !

Qu’importe les protestations du Syndicat de la magistrature, rappelant que dans un Etat de droit, il appartient, non pas à l’administration préfectorale, mais au juge de se prononcer sur une éventuelle interdiction. UNSA Police, ce syndicat bien à droite, devait d’ailleurs rappeler à Valls qui opinait, les propos de Mme Alliot-Marie : « Le maintien de l’ordre à la française est une référence dans le monde entier, il faut rester sur ce qui a fait ses preuves »…

Cette commission parlementaire s’est donc prononcée par 13 voix contre 2 pour avaliser, non seulement la répression exercée à Sivens, sans doute en prévision de désordres à venir compte tenu des politiques d’austérité et des indignations suscitées par les grands projets inutiles, mais surtout, recommanda qu’on ne s’embarrasse pas de la magistrature, de ces « petits pois » comme les désignait Sarko.

Ainsi, la continuité est assurée, mieux, l’on semble revenir vers la pratique, à défaut d’une « loi anticasseurs », à Marcellin la trique… avec surveillances généralisée en plus.

Gérard Deneux, le 28.06.2015


samedi 27 juin 2015

Migrants : les exilés, pourchassés, surexploités.
Les damnés de la terre et de la mer (1)

Parler des migrants, c’est d’abord distinguer deux phénomènes distincts, même s’ils ont les mêmes effets négatifs : mise en concurrence des salariés, baisse des salaires et développement de la xénophobie. Il faudrait pouvoir également évoquer la richesse culturelle qu’amène ce nouvel apport de main d’œuvre dans une Europe où certains pays vieillissants à la démographie déclinante ont de fait besoin. Mais ce serait nous entraîner trop loin, dans le cadre de cet article : il serait également nécessaire de soumettre à la critique les politiques néolibérales d’austérité et les conséquences issues de la mondialisation du capitalisme débridé,  notamment la désindustrialisation résultant des délocalisations (2). Concentrons-nous brièvement sur les migrants européens et plus longuement sur ceux venus des pays du Sud.

Travailleurs détachés, toujours enchaînés

Leurs migrations temporaires… résultent d’une directive de Bruxelles. Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Europe sous « l’heureux » prétexte de la libre circulation des travailleurs ont, de fait, organisé légalement le dumping social. En France, les « réguliers » sont 230 000. Les cotisations sociales patronales payées par les entreprises françaises sont celles correspondant aux normes en vigueur du pays d’origine de ces salariés. C’est tout bénéf : l’inspection du travail estime que 220 000 à 300 000 (s’ajoutant aux « réguliers ») sont non déclarés. Ces fraudes qui prennent l’aspect du travail au noir, de dépassement des limites horaires, de rémunération sous le SMIC et de droit syndical bafoué, résultent du recours systématique à la sous-traitance en cascade. La grosse entreprise qui a arraché le marché à bas coût, sous-traite pour conserver ses marges, pressure les sous-traitants qui, en bout de chaîne, surexploitent la main d’œuvre. Bouygues semble le champion toutes catégories pour ce genre d’arnaque. Face aux scandales révélés par les syndicats, et des contrôleurs du travail en nombre insuffisant, la directive bruxelloise a été modifiée, il y a un an : la responsabilité du donneur d’ordre pourrait être mise en cause devant les Prud’hommes. Sapin s’est exclamé « C’est une réforme ambitieuse » dont on attend toujours les effets. 

Sous la pression britannique de Cameron qui consiste à limiter le droit d’accès de ces travailleurs migrants et celle de Merkel qui dénonce un fantaisiste « tourisme social » venant piller les caisses sociales allemandes, Valls et Rebsamen ont opiné du bonnet pour réécrire la directive de Bruxelles afin de mieux surexploiter légalement ces migrants. S’ils viennent, la plupart des pays de l’Est, c’est qu’ils subissent là-bas les affres du libéralisme et des privatisations qui ont entraîné des baisses de revenus considérables. Ils ne s’expatrient que pour envoyer de l’argent à leurs familles et se procurer une rémunération plus décente que dans leur pays. Et dans le même mouvement, sans en être aucunement responsables, ils organisent de fait la baisse des salaires dans le pays d’accueil. Cette directive bruxelloise, issue de celle promue par Bolkestein qui nous promettait, lors du référendum sur le Traité Constitutionnel Européen (rejeté mais mis en œuvre dans le traité de Lisbonne) des plombiers polonais à bas coût, a produit ses effets. Pour ne prendre qu’un exemple, citons celui de la région de Southampton au Royaume Uni : de 2003 à 2014, la rémunération journalière dans le BTP est passée de 190 à 95 euros. La xénophobie et le racisme trouvent leur source dans cette réglementation, dans la permissivité vis-à-vis des fraudes ainsi que dans la peur du déclassement chez les travailleurs anglais.

Dans la dernière période, « l’afflux » de migrants venus des pays du Sud (qui est d’ailleurs un phénomène mondial) a changé la donne : sans papiers, présentés comme des migrants économiques essentiellement, ils n’auraient pour tout avenir que celui d’être refoulés.

Ceux qui viennent des pays du Sud

Mis à part ceux qui viennent des pays du Maghreb (Marocains, Tunisiens, Algériens) et font l’objet de règlementation avec les pays européens (le regroupement familial par exemple), il y a ceux qui viennent d’ailleurs, le plus grand nombre, nous dit-on. Pourquoi ? Il y a trois grands facteurs explicatifs qu’il faut d’abord énumérer avant de décrire le système juridique, contraire à tout esprit de solidarité européenne, qui a été mis en place pour tenter de juguler cet « afflux ».

C’est d’abord la mise en œuvre des plans structurels par le FMI, pour inciter les pays d’Afrique en particulier qui, avec les complicités des dictateurs en place, a appauvri ces pays, cassé leur développement. A coups de privatisations, de baisse des maigres prestations sociales, d’ouverture aux produits agricoles subventionnés par les pays riches du Nord, ces pays se sont appauvris pour rembourser leurs dettes publiques dont les taux d’intérêt imposés étaient exorbitants. La pauvreté résultant de la libéralisation des échanges et l’effondrement de leur production agricole a provoqué ces migrations dites économiques, mais assurément politiques si l’on se réfère à leur origine et leur développement actuel : le néo-colonialisme.

Ensuite, il y a le réchauffement climatique résultant, pour l’essentiel, du capitalisme productiviste et extractiviste et de l’émission de gaz à effet de serre. Au Sahel, au Burkina Faso, entre autres, le désert avance et il est de plus en plus difficile de maintenir les cultures existantes…  Restent les bidonvilles dans l’entassement des énormes agglomérations puis la fuite vers d’autres cieux plus cléments en espérant que ceux qui restent au pays pourront bénéficier des envois d’argent de ceux qui sont partis. Bref, ces migrants climatiques sont aussi des réfugiés politiques en ce sens qu’ils sont victimes des politiques qui ont été imposées par le capitalisme industriel venu du Nord qui s’exporte dans nombre de régions dites émergentes.

Enfin, troisième facteur d’explication, ce sont les guerres et les dictatures qui en résultent. Il suffit de citer ces guerres interminables en Afghanistan, les invasions de l’Irak par les USA, l’intervention militaire en Libye, la répression des printemps arabes notamment en Syrie, pour saisir la responsabilité majeure des pays occidentaux, en premier lieu des  USA, sans omettre la Grande-Bretagne de Blair et la France de Sarko-Hollande.

Reste à préciser que toutes ces victimes qui fuient la famine, la dictature et les guerres, sont réfugiées surtout dans des pays limitrophes d’où ils ont été pratiquement chassés. La plupart vivent en effet dans des camps. Ils sont plus de 620 000 en Jordanie, 1,8 million en Turquie et 1,15 million  au Liban, ce qui correspond pour ce dernier pays au ¼ de sa population autochtone, (dans un pays divisé entre sunnites et chiites), ce qui équivaudrait pour la France à une émigration de 14 millions pour le moins. Quant au nombre de migrants stationnés en Libye, il reste inconnu en l’état avant qu’ils ne parviennent à traverser le Méditerranée.

Le cynique système de Dublin

Sous prétexte d’une protection subsidiaire de proximité, la réglementation dite de Dublin oblige les Etats où sont arrivés en premier lieu les demandeurs d’asile, de traiter leurs demandes, de subvenir à leurs besoins et de gérer le retour des migrants renvoyés de France, d’Allemagne et d’autres pays européens. Cette hypocrite application de la règle de subsidiarité laisse la Grèce, l’Italie et, dans une moindre mesure l’Espagne, supporter les « fardeaux » de l’accueil et des transits. La prétendue solidarité européenne n’est qu’un vain mot d’une « efficacité » des plus douteuses. Selon Eurostat, sur 425 000 demandes d’asile rejetées, seuls 167 000 des demandeurs ont quitté le sol européen, le « reste », des clandestins, des sans-papiers vivent dans des conditions abominables ou sont surexploités dans l’attente d’une éventuelle régularisation. Toujours la concurrence entre les salariés, les sans droits et les autres…

Et quand l’italien Mattéo Renzi haussera le ton, menaçant de procurer aux demandeurs d’asile des passeports européens, ou lorsque la Commission européenne, appliquant l’orientation du Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement, préconisera une répartition qui se veut équilibrée des demandeurs d’asile, Valls-Hollande s’effaroucheront refusant les quotas et la révision du système de Dublin, arguant que « les demandes d’asile doivent être instruites sur place ! ». Les drames humanitaires ne semblent pas les émouvoir outre mesure, ils préfèreront surfer sur la vague xénophobe.

L’inhumain bilan provisoire

Depuis le début 2015, 51 000 migrants sont arrivés en Europe par la Méditerranée, 30 500 ont débarqué sur les côtes italiennes. Au 7 mai, on dénombrait 1 829 noyés, soit un chiffre 9 fois supérieur à l’année 2014. Ces données ne rendent pas compte de ceux qui, passant par la Turquie et la Grèce, sont bloqués, rançonnés à la frontière macédonienne, victimes de la maffia albanophone. Et la journaliste Adéa Guillot de rapporter les propos de ces déshérités : « Si on n’accepte pas de bosser pour eux (la maffia)… ils nous buttent ». « On est déshabillé, fouillé, extorqué, emprisonné », « notre libération est conditionnée au versement de 1 500 dollars que doit nous envoyer notre famille ». Pour passer la frontière à pied, le tarif est de 800€ par personne, 1 700€ en voiture. Bref, la Macédoine est devenue l’une des plaques tournantes de tous les trafics d’êtres humains dont les profits se chiffreraient à des milliards d’euros.

Deux autres journalistes, Palladino et Tornago ont rendu compte de l’enquête menée par le Procureur de Palerme. Il a mis en évidence la nature et les imbrications d’un réseau de trafiquants, possédant des filiales au Soudan… des passeurs en Italie et même un « représentant » financier basé aux USA, un dénommé Wedi Areb. Il est capable, dit-il, de transférer de l’argent dans le monde entier, d’en entreposer dans une banque de Dubaï ou d’autres paradis fiscaux. « La traçabilité de l’argent en circulation est quasi impossible ». Il y a de multiples intermédiaires, des cellules siciliennes, à Milan, etc. La prolifération des versements de petites sommes, l’utilisation de la Western Union qui permet aux migrants d’envoyer ou de recevoir de l’argent, tout est utilisé pour rendre ce système opaque… bien connu, mais il faut des moyens de police ; tout ça pour signifier que « l’Europe passive jette les réfugiés dans les bras de la maffia » pour citer un autre journaliste d’investigation qui a enquêté sur les côtes libyennes. Dans le chaos provoqué par les grandes puissances, prolifère une industrie cynique de petites passeurs et de gros caïds, ses réseaux et ses profits qui s’assurent des connivences occultées.

Tout ça se sait et le phénomène est mondial. L’Office international des migrations a estimé, qu’entre 2000 et 2014, 40 000 migrants sont morts, 22 000 pour rejoindre l’Europe et 6 000, rien qu’à la frontière entre le Mexique et les USA. Ces chiffres mériteraient d’être mis à jour face aux conséquences des politiques racistes. En Birmanie notamment, des centaines, des milliers d’apatrides, comme les Rohingya sont repoussés des côtes australiennes, militairement. Le gouvernement australien, qui n’a pas démenti, a été accusé de payer les passeurs qui s’approchent des côtes pour délester leurs « cargaisons » sur des îles quasi désertes au milieu de l’océan Pacifique (3).

Ces politiques de non-assistance à peuples en danger s’accompagnent de la militarisation des frontières, de l’édification de murs de la honte comme aux USA, en Bulgarie, au Maroc, en Arabie Saoudite, pour ne citer que quelques exemples significatifs. Il s’agit de mesures de rejet de toute une partie de l’humanité qui est considérée comme indésirable, des errants, des métèques, des superflus de la mondialisation que la Commissaire européenne, saisissant l’ONU, définit comme une « menace pour la paix ». Elle prétend recevoir le feu vert de cette instance internationale pour mener, au nom de l’Europe, des opérations militaires contre les embarcations de passeurs en prétendant éviter les « dégâts collatéraux » ???

Quant au gouvernement Valls/Hollande, il n’hésite pas à recourir à la bastonnade et aux gaz lacrymogènes pour disperser les regroupements de migrants, comme le 2 juin lors de l’expulsion de 350 d’entre eux, au métro La Chapelle, essentiellement des Soudanais, des Erythréens, des Egyptiens et des Somaliens. Ou encore, les 8 et 9 juin, rue Pajol dans le 18ème arrondissement. Et face à la mobilisation citoyenne de solidarité, Cazeneuve de déclarer que l’aide et le soutien humanitaires n’étaient que « pure démagogie et irresponsabilité ». Le blocage de la frontière à Vintimille démontre également qu’il y a bien continuité entre Sarko et Hollande, il ne s’agit pas seulement d’un Waterloo moral comme l’a prétendu Duflot, mais d’un cynisme raciste à peine voilé qui entretient la peur de l’étranger, tout en condamnant toute mobilisation humanitaire qui serait susceptible de retourner l’opinion publique « manipulée ». Il suffit de se souvenir de l’attaque des CRS de l’église Saint Bernard où s’étaient réfugiés des migrants et l’émotion que les coups de haches dans les portes de ce lieu d’asile avaient provoquée, déstabilisant le Juppé d’alors « droit dans ses bottes ». 

Mais qui sont-ils tous ces migrants ?

Face à la haine répandue, au racisme néocolonial qui perdure, qui les considère comme des sous-hommes que l’on peut maltraiter, il faut donner l’image positive qui leur convient. Certes, ces damnés de la terre et de la mer sont vulnérables, mais ce sont surtout des naufragés de la vie, faisant preuve d’un courage incroyable. Ils affrontent la mort dans le désert et sur la mer, vivent sous les menaces de l’arrestation, de la rétention, de l’expulsion. Ils sont ceux que l’on enferme dans des campements misérables. Ce sont des cerveaux qui fuient et que l’on rejette comme des déchets de la mondialisation libérale. C’est un gâchis humain insupportable d’autant que, trouvant finalement à s’employer, ils deviennent de nouveaux galériens surexploités car ces nouveaux aventuriers sont prêts à tout pour s’en sortir, pour soustraire à leurs maigres pécules, des sommes d’argent à envoyer à leurs familles restées au pays.

Face à cette réalité, c’est l’accueil et l’égalité des droits qu’il faut réclamer pour eux, afin de briser cette logique mortifère de traite d’êtres humains et la xénophobie qui, idéologiquement, s’euphémise… Encore qu’il faille comprendre que le capitalisme financiarisé et les politiques d’austérité font système avec cette politique de rejet des migrants (comme annoncé en introduction), en insistant sur les trois causes fondamentales qui l’ont provoquée. Qui plus est, les politiques d’austérité et de désindustrialisation dans notre pays, impliquent d’aller au-delà de la simple dénonciation humanitaire.

En France comme ailleurs, le système inégalitaire devient indécent, la petite minorité d'ultra-riches et les autres, même s’il subsiste une classe moyenne, subissent les affres d’un possible déclassement. L’UNICEF a fait le décompte : 3 millions d’enfants sous le seuil de pauvreté, 30 000 SDF, 9 000 vivant en bidonvilles et plus de 6 300 000 chômeurs, toutes catégories, soit 21% de plus, depuis l’intronisation de Hollande. Et quant aux embauches 86.2% se sont réalisées au dernier trimestre en CDD de plus en plus courts, en temps partiels contraints et autres intérims et emplois  « aidés » !!!

C’est contre la caste au pouvoir qu’il faut se battre pour une véritable alternative au système. L’unité populaire des français et des étrangers est incontournable. Cette lutte unitaire doit intégrer la dimension d’un combat contre les guerres néocoloniales et la promotion d’un autre mode de production et de consommation pour préserver l’écosystème et la planète que le productivisme et l’extractivisme sont en train de détruire.

Gérard Deneux, le 25.06.2015

(1)   Cet article est une reprise des notes ayant servi à l’émission Remue-méninges que le AES ont animée sur Radio Amitié le 18.06.2015
(2)   Pour en savoir plus sur les conséquences des politiques d’austérité, de démantèlement des dispositions sociales et des privatisations, lire « la stratégie du choc. Le capitalisme du désastre » de Naomi Klein, éd. Actes Sud. Et le monument « Histoire de la Grèce et les Balkans » en particulier le tome 3 (pages 1896 à 2024) d’Olivier Delorme, éd. Folio histoire
(3)   Naomi Klein dans son dernier livre « Tout peut changer. Capitalisme et changement climatique » rapporte l’édifiante histoire mortifère de l’île de Nauru (p. 190 à 197) que je me propose de résumer tant elle est emblématique



jeudi 25 juin 2015

Un billet pour la paix

PALESTINE, tu es dans notre estime
Dans nos pensées les plus intimes
Nous tous contre la vermine
Celle qui opprime
qui nous comprime
Celle qui assassine
Et qui chagrine
Ces vies que l'on supprime
Comme un battement de cils
Sous une plaie de mines
Qui parade en vitrine
Me ronge et me contamine.
Quand un peuple fulmine
Contre l'injustice, unanime
pour retrouver ses racines
Celles qui lui sont dignes
Là où il a planté ses vignes
Je veux lui faire un signe
pour retirer l'épine
D'un monde qui s'abîme
Redonnons la voix légitime
contre tous ceux qui expriment
Une idée qui les contamine
Des mots qui les ruinent
qui les placent en victimes.
Quand cessera cette infamie ?
Arrêtons ces colonies
Pour leur redonner la vie
Pour assainir le pays
de tout ce qui le pourrit

Hassen
Dans le n° 15 de PES, il y a :


  1. Moyen-Orient. Le guêpier (suite) de Gérard Deneux 
  2. Grèce : rétablir la vérité face aux bobards de Serge Victor
  3. Social Business d'Odile Mangeot
  4. Le business de l'armement : il faut s'en mêler ! de Bernard Marion
  5. En attendant la conférence sur le climat (bastamag)
  6. A mort la mort ! Le transhumanisme (Jano Celle)
  7. Soutien à la Palestine (Samir Saffieh)


et une invitation à écrire de Jérôme Vuittenez, 
auteur de "Un pas de côté"

version intégrale téléchargeable librement au format électronique sur http://merome.net



Lu dans « la stratégie du choc » de Naomi Klein

« Un traumatisme collectif, une guerre, un coup d’État, une catastrophe naturelle, une attaque terroriste, plongent chaque individu dans un état de choc. Après le choc, nous redevenons des enfants, concentrés sur notre survie à court terme, désormais plus enclins à suivre les leaders qui prétendent nous protéger ». Bush connaît ce livre par coeur, il l'a prêté à Sarkozy qui a dû le passer à Hollande… Est-ce que ça a donné, à Valls, l'idée de la loi sur le renseignement ?

Jean-Louis

Lire absolument "La stratégie du choc"
paru aux éditions Actes Sud

Lire aussi son dernier ouvrage 
"Tout peut changer. 
Capitalisme et changement climatique"
 éditions Actes Sud.
Vous en aurez un avant-goût dans la rubrique "Nous avons lu" du PES à paraître fin août.  


Brèves de débat

Jean-Louis a participé au débat sur :  
22 ans après les accords d'Oslo, quel bilan ?
Quelles perspectives pour la Palestine ?
avec Alain Gresh* et Julien Salingue*

Voilà ce qu'il en a retenu et qu'il veut partager

C'était le 9 juin, à Montbéliard, à l'initiative du CRAC 19, avec les Amis de l'émancipation Sociale, les Amis du Monde Diplomatique Nord Franche-Comté et l'Atelier.

Les accords d'Oslo (1993), selon Julien Salingue :

Contexte en 1993 : l'OLP est faible - l'URSS restreint son soutien - l'OLP soutient l'Irak pendant la guerre du Golfe et ternit son image en Occident - l'intifada s'éternise…
Les accords d'Oslo sont matérialisés par un échange de lettres :
- une lettre palestinienne (1page1/2) : reconnaissance du droit à l'existence d'Israël, arrêt de la lutte armée
- une lettre israélienne (1 ligne 1/2) : reconnaissance de l'OLP.
Israël s'engage en outre à donner une autonomie « relative » à une partie croissante du territoire palestinien, sans le quitter militairement. En clair : si vous voulez plus de territoires autonomes, montrez que vous êtes capables de faire la police, dans ceux que vous contrôlez. L'objectif des accords d'Oslo est d'étouffer la volonté de révolte des Palestiniens par le chantage effectué sur l'autorité palestinienne, pendant que la colonisation continue. Israël fait faire la police par l'autorité palestinienne (40 % des fonctionnaires palestiniens sont des policiers (c'est plus que dans la Syrie d'Assad ou l'Irak de Saddam Hussein). Les dirigeants palestiniens sont remerciés de faire le sale boulot en coulant des jours heureux dans des îlots de richesses et de douceurs. Israël profite en plus de l'aide internationale aux territoires autonomes, car cet argent sert aux Palestiniens pour acheter des produits israéliens : autrement dit : l'aide internationale finit en subvention à Israël. Exemple : l'aéroport de Gaza a été construit avec des aides européennes avec du ciment acheté à Israël, détruit par Israël, reconstruit par les Occidentaux avec du ciment acheté à nouveau à Israël ! Israël et les Occidentaux ont inventé le mouvement universel en matière économique.

Oslo a donné l'illusion que le « conflit israélo-palestinien » était en passe d'être résolu, donc a donné une légitimité internationale à Israël.

Qu'en est-il ?

- 1993 : 250 000 colons en Cisjordanie et Jérusalem - 2015 : 650 000 colons
- Israël perçoit des droits de douane sur tout ce qui entre en Palestine, puis les reversent, selon son bon vouloir, à l'autorité palestinienne (cela représente 60 % de son budget), alors quand Israël ne verse pas...
- Israël peut arrêter n'importe quel Palestinien dans les territoires autonomes, en 2014 = 9 000 Palestiniens ont été jugés, 99,4 % ont été déclarés coupables…
- Israël n'est pas l'Afrique du Sud… En Afrique du Sud, il n'y a jamais eu de routes réservées aux Blancs…
- Après la victoire électorale du Hamas à Gaza (2006), l'aide internationale a été suspendue : en 15 jours, l'économie s'est effondrée, détournant les Gazaouïs du concept de démocratie occidentale, les jetant dans les bras de formation extrémistes
- L'Occident a « cassé » les régimes laïques, socialistes (Nasser, Saddam Hussein…) qui, malgré beaucoup de défauts, avaient quelques qualités, et ce faisant, a jeté les populations dans les bras des islamistes extrémistes. Ceci a permis de transformer un conflit territorial en conflit religieux (le Hamas remplaçant l'OLP, côté palestinien, les extrémistes religieux remplaçant les Sionistes souvent athées, côté israélien)

Un peu d'espoir

Les grands axes d'aide au peuple palestinien :
- internationaliser la lutte
- unir les combattants
- rendre la lutte populaire.
Sur les 1er et 3ème points, nous pouvons jouer un rôle important. Le Boycott Désinvestissement Sanction est un moyen : les Palestiniens sont très favorables au Boycott d'Israël même s'ils finissent par en subir les conséquences. Chaque achat de produits palestiniens via l'AFPS, Euro Palestine, sur les sites de ventes internet (Philistins, Sark…), chaque visite d'un Occidental en Cisjordanie, chaque appel au Boycott, participent donc efficacement à l'existence des Palestiniens et à la réussite de leur lutte.
Israël veut à long terme chasser les Palestiniens de leur patrie, de leur territoire, la meilleure lutte pour les Palestiniens est de vivre, d'avoir des projets humains, économiques, d'exister sur leur terre (hors des ghettos artificiels tels que Ramallah) pour empêcher Israël de les chasser.
La guerre d'Israël contre les Palestiniens est le résultat des actions des Occidentaux, en particulier France et Royaume-Uni (plan de partage de la Palestine en 1916) donc, nous devons en parler, en débattre en France : ce n'est pas une « importation » du conflit en Occident que faire ça, au contraire, c'est participer à démonter les bobards répandus par, notamment, la diplomatie française (légèrement pro-israélienne!) quand elle n'emploie jamais les termes « occupés-occupants » mais plutôt «conflit bilatéral » ou quand elle présente Israël comme un Etat protecteur face à l'islamisme extrémiste, etc.

Jean-Louis Lamboley

*journaliste au Monde Diplomatique, auteur de  De quoi la Palestine est-elle le nom ?(2010), Israël, Palestine : Vérités sur un conflit (2001) et Julien Salingue, auteur de L'autonomie palestinienne (1994-2000), Anatomie de l'échec du processus de construction étatique palestinien (2014), A la recherche de la Palestine (2011)






Pour vous mettre l'eau à la bouche et vous abonner à Pour l'Emancipation Sociale (PES), voici l'édito du dernier numéro (n° 15) juin/juillet

 Cacophonie. Chaos. Comm. et sinistrose

A l’UMP, devenue Les Républicains de façade, la cacophonie s’accentue. Les talents surestimés de Sarko, le bateleur d’estrades chassant sur les terres du FN, ne parviennent pas à réduire l’influence de Juppé et consorts en vue de la primaire de la lutte des places. Au PS, le congrès truqué pour remettre en selle la candidature d’Hollande, l’impopulaire, pour la prochaine présidentielle n’a pas fait disparaître la fronde des minoritaires qui craignent pour leurs sièges aux prochaines régionales. Même le FN a du mal à régler ses comptes internes avec sa vieille garde d’un autre temps… A la Gauche de la Gauche, les tiraillements pour quelques strapontins électoraux participent à cette même cacophonie.

Et ce, dans un constat de faillite des politiques néolibérales d’austérité. Il semble déjà loin l’accord sur la sécurisation de l’emploi de 2013 et le pacte de responsabilité, qui devait accoucher d’un million d’emplois pour la modique somme de 40 milliards d’euros versés aux patrons. En 3 ans, de fin avril 2012 à 2015, le nombre de chômeurs, toutes catégories, a bondi de 21%, passant de 5 232 500 à 6 327 700 (3 586 000 en catégorie A + 22%). Seuls 52.2% d’entre eux sont indemnisés ! Le chaos s’installe avec la désindustrialisation qui s’accélère, la précarisation qui s’accentue. Les 450 000 contrats aidés, les 100 000 contrats supplémentaires, n’y changeront rien. La cécité volontaire des gouvernants persiste…à précariser le salariat, en doublant la possibilité de recourir aux CDD de plus en plus courts et à faciliter les licenciements « illégaux et abusifs » pour un forfait prudhommal qui réjouit le MEDEF : « C’est une bonne initiative » pour la même litanie : « Pouvoir licencier crée de l’emploi » ! A la manière du dernier trimestre, au cours duquel 86.2% des embauches sont des CDD courts ou de l’intérim ?! Quant à Rebsamen, il pense avoir trouvé la solution en faisant la chasse aux chômeurs !

Sœur « âne », ne vois-tu rien venir ? La courbe du chômage qui va s’inverser ou  la croissance va repartir ? Comme la communication ne suffit plus, Hollande, le rameur, « accélère », devient VRP de l’industrie d’armement, après s’être embourbé dans des guerres néocoloniales, et multiplie les visites en province, bien encadrées pour éviter les sifflets. Il compte désormais redresser la courbe de son  impopularité et faire la nique à Sarko qui, en Israël et ailleurs, suit la même voie, tentant ainsi de prouver qu’il est moins médiocre.

Alors qu’il faut désormais abuser du 49-3 pour faire passer en force la loi Macron, Hollande/Valls et consorts misent sur COP 21 afin d’écarter toute candidature d’EELV ; ça va être absurde de vouloir faire baisser le CO2 en répandant sur tout le territoire des cars, se substituant aux transports ferroviaires !  Sponsorisés par les grandes entreprises, les « Verts » de gris ne risquent pas de sauver la planète malgré l’armada des chefs d’Etats qui y seront invités. Nouvel échec après celui de Copenhague ? C’est dire que la sinistrose ambiante risque encore de s’étendre faute de perspectives car, comme le souligne Naomi Klein, l’écologie ne peut être que radicalement anticapitaliste(1).

Pour dissiper ces miasmes et la montée pestilentielle du chauvinisme xénophobe qui se répand, il faudrait un sursaut, un automne chaud. On n’aura pas assez des congés d’été pour se ressourcer, accumuler des convictions, débarrassées de toutes illusions, pour résorber la sinistrose qui semble toujours tétaniser toute mobilisation populaire.

(1)   Une note de lecture prochaine rendra compte de ce livre majeur : Tout peut changer. Capitalisme et changement climatique, éditions Actes Sud, 24.80€   


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