Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mardi 27 août 2013

Hommage à Tiennot
Pour que surgissent des militants de son envergure

Tiennot Grumbach fut de tous les combats malgré l’adversité d’une époque où les rêves se fracassent sur la réalité. Il a changé sans jamais se renier, osé se tromper afin de poursuivre le même combat pour la justice sociale et toujours aux côtés des exploités et des opprimés.

A 74 ans, il vient de s’éteindre douloureusement. Il était né en 1939, à Paris, et déjà dans la clandestinité pendant toute la guerre, pour échapper avec son frère aux rafles antisémites. Sorti de sa cache à Font-Romeu, ce jeune juif, neveu de Pierre Mendés France, s’affirme antifasciste et anticolonialiste. Les révélations sur la torture en Algérie le font adhérer au PSU. 1961, fin de la guerre d’Algérie, il embarque pour ce pays : «Je croyais à la révolution, à l’avènement d’un grand Etat démocratique, socialiste et populaire». Il y reste 3 ans. Puis, ce «pied rouge» reprend ses études, adhère à l’UEC, s’oppose à la ligne de compromission avec les socialistes Guy Mollet, Mitterrand et consorts. En 1966, il fonde avec Robert Linhart (1) l’UJCML (étudiants maoïstes, althussériens à l’origine). A l’époque «le fond de l’air est rouge», les luttes ouvrières insubordonnées (2) semblent faire écho aux luttes de libération nationale (Vietnam, Palestine…). Après 1968, maoïste libertaire, il fonde le journal «Ce que nous voulons ? Tout» pour les classes populaires. Il s’établit comme ouvrier à Citroën pendant 3 ans, de 1969 à 1971. Mais l’heure est au repli de la vague de contestation, à la crise des 30 Glorieuses, à la répression des «gauchistes» (3). En 1972, il ouvre son cabinet d’avocats pénalistes dans une banlieue populaire à Mantes-la-Jolie «pour pouvoir être utile à mes potes d’extrême gauche en tôle», y compris les soldats perdus d’une révolution introuvable comme Pierre Goldman. Puis, il se  spécialise dans le droit du travail, défend les sans grade, licenciés, broyés, forme des jeunes avocats pour «les droits et libertés des travailleurs». Au-delà des petites victoires qu’il a accumulées en faveur de ces dominés, son plus grand succès après des années de procédure est la reconnaissance des licenciements abusifs dont ont été victimes les mineurs révoqués lors des grandes grèves de 1948 à 1952.

Je l’avais côtoyé rue d’Ulm ou encore, il n’y a pas si longtemps, à Sochaux, mais je le connaissais surtout par son ami, et mon ami, Patrick Batten, avocat du droit du travail à Lyon. Il avait un parcours similaire bien que plus jeune, lui aussi est disparu trop tôt.

En ces temps de crise et de reculs, de consternations, de montée de l’extrême droite, de léthargie d’une classe ouvrière émiettée, d’indignations qui ne sont pas encore à la hauteur des enjeux, il est temps que surgissent des militants de son envergure afin que les faux amis du peuple retournent dans les ornières de la défunte SFIO (4).

Gérard Deneux, le 23.10.2013

(1)   Lire «L’établi» de Robert Linhart – éditions de minuit
(2)   «L’insubordination ouvrière dans les années 68» Xavier Vigna – Presses universitaires de Rennes
(3)   «Génération» tome 2 «Les années de poudre» Hervé Hamon et Patrick Rotman – Seuil

(4)   Lire à ce sujet «De l’abandon au mépris. Comment le PS a tourné le dos à la classe ouvrière» de Bertrand Rothé avec une préface de Gérard Mordillat - Seuil