Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 30 juin 2013

Pour poursuivre la discussion lancée lors de l’AG par Jean-Jacques

Les AES se sont constitués en 2002, dans la mouvance de  l’altermondialiste qui venait de révéler ce que tramait « le gouvernement invisible » en toute opacité, à savoir les traités et autres accords internationaux libéralisant l’ensemble des activités économiques et humaines (exemple l’AMI). Il redonnait espoir dans « un autre monde possible » au moment où  nombre de militants mais aussi d’habitants des quartiers populaires étaient déçus des appareils et institutions politiques, dans l’incapacité de tenir un projet cohérent de transformation sociale favorable aux classes sociales se paupérisant.

Quelques années plus tard, nous nous engagions très ardemment dans la dénonciation du TCE en ce qu’il révélait des ambitions de « nos » gouvernants ou de ceux qui prétendaient gouverner (le PS soutenant le TCE). Réunions, tracts, débats permirent de tisser des liens avec d’autres partis politiques ou associations ou encore non encartés, pensant que les élections présidentielles étaient un moment privilégié pour faire de la politique autrement et permettre de participer sous d’autres formes à la vie politique. Certains  imaginaient, même, que le camp des antilibéraux et des anticapitalistes pourrait faire une percée significative, bousculant le remake habituel des alliances contre nature, pesant ainsi dans le paysage politique.

Mais, dès que pointe une élection, c’est la division qui s’impose, et la Gauche de la Gauche n’y  échappa pas, faisant éclater les rapprochements qui nous avaient semblé possibles, même si les discussions locales et nationales, auxquelles nous participions, laissaient voir et entendre des luttes de places. Et ce fut l’éclatement de la Gauche de la Gauche, et à nouveau la défaite de ceux qui espéraient la naissance d’autre chose.

Parallèlement, nous pensions que toutes les luttes étaient nécessaires pour construire une unité populaire et nous participions  à dénoncer les guerres, le racisme et l’islamophobie, nous associant ou initiant des manifestations, des débats, des rassemblements ; dans ces luttes nous pouvions mobiliser les habitants des quartiers populaires, et notamment  les jeunes engagés dans le mouvement associatif qui avaient résisté à la récupération par les partis traditionnels locaux, puis subi la diabolisation par les mêmes qui les avaient approchés en vain,  rejoignant le mouvement général d’islamophobie.

Pendant toutes ces années, les AES n’ont pas eu comme « simple objectif leur développement » et ils n’ont pas « opposé ceux qui sont dans les appareils à une base mythique » ; nous avons tenté, chaque fois que cela a été possible, de constituer l’unité des antilibéraux et anticapitalistes, dans différents collectifs, s’appuyant sur l’actualité sociale et politique locale, nationale et internationale (Collectif pour la paix, collectif Palestine, collectif pour l’annulation de la dette, contre les violences policières, le tout dernier étant le Collectif antifasciste en cours de constitution sur Belfort), organisant des Forums sociaux locaux et participant aux initiatives nationales, alliant systématiquement réflexion/action, réunissant militants,  « citoyens » et ceux qui ne le sont toujours pas (non Français sans droit de vote), jeunes des quartiers populaires, partis politiques, syndicats, associations et mouvements écologistes ou antinucléaires. La liste serait très longue si l’on se donnait la peine d’en faire un recensement exhaustif et nous sommes fiers d’avoir participé à des manifestations et rassemblements que les partis traditionnels désertaient, en donnant la place à ceux qui avaient le plus intérêt à dénoncer le système qui les exploite.

Mais, force est de constater que toutes ces tentatives (qui avaient lieu surtout sur Belfort/aire urbaine là où nous étions plus présents mais aussi en Haute-Saône au moment du TCE, par exemple, ou de luttes pour le maintien des services publics de proximité, etc.), n’ont encore pu se transformer en force politique suffisamment visible et pouvant faire poids dans le système institutionnel tel qu’il existe, personnalisant les élections, où le projet de société passe à la trappe, face aux « enjeux » de gagner ou de garder des places, quitte à accepter des alliances contre nature, ou à montrer du doigt ceux qui oseraient rompre cette unité lorsque l’extrême droite menace : « tous contre le FN ».

Nous en concluons que la nécessité première, pour nous, n’est pas de rallier un parti politique, même si celles et ceux qui veulent le faire adhèrent simultanément aux AES. Nous pensons que ce qui est premier est la compréhension et l’analyse de ce qui se passe dans la société, à partir de là où nous vivons, où nous militons, incluant bien entendu ceux qui habitent les quartiers populaires, et subissent depuis des décennies les politiques d’austérité et de discrimination, de violences policières – en ce sens, nous avons participé aux Forums sociaux des quartiers populaires au niveau national et adhérons au FUIQP – front uni de l’immigration et des quartiers populaires. Notre base n’est pas mythique, elle est diverse et compte nombre de copains subissant le capitalisme en pleine face (pas de boulot, pas de fric, pas de logement …), totalement désabusés et ayant une méfiance épidermique face aux partis qui n’ont jamais eu le souci de les défendre (voire qui les ont condamnés dans l’affaire du foulard ou encore en 2005, dénonçant les violences des jeunes des quartiers, sans vouloir regarder les violences institutionnelles qu’ils subissaient depuis des années).

Alors, certes, nous sommes déçus de constater que  malgré l’énergie que nous continuons à fournir, nous ne réussissons pas à mobiliser  ceux  qui subissent de plein fouet l’austérité à la Sarkozy hier, à la Hollande aujourd’hui, pour qu’ils « descendent dans la rue » comme en Espagne, dans les pays arabes, au Brésil ou encore en Turquie. Et nous pensons que le changement  ne viendra pas des élections (ce serait déjà fait puisque la « Gauche » en Europe a eu le pouvoir et au niveau de l’UE fut même largement représentée). C’est en ce sens que je pense qu’il est naïf, voire utopique, de faire croire ou vouloir croire, surtout lorsque l’on est comme toi Jean-Jacques un militant averti, que « toutes celles et ceux qui se retrouvent dans les mouvements de contestation de cette société sont en fait dans un même parti, dans un même camp qu’il faut construire ». Les dix dernières années l’ont prouvé, ça n’a pas marché, et pourtant nous avons été nombreux à défiler dans les rues pour dénoncer les régressions sociales en matière de retraite, de services publics (santé, éducation, etc.) où se côtoyaient nombre de partis et de syndicats, pas toujours copains d’ailleurs, scellant des alliances superficielles, voire même avec des idées de récupération. Les classes sociales sont une réalité et elles ne se rejoignent pas sur tout.

Ce qui est certain, et les élections à venir ne le démentiront pas (c’est pourquoi, certains ont tout intérêt à diaboliser le FN et les violences fascistes), c’est que la majorité des citoyens (et si on pouvait ajouter les non citoyens… le jour où ils auront le droit de vote) rejette la classe politique qu’ils qualifient globalement de « pourrie », voire « corrompue », et, les exemples malheureusement ne manquent pas pour valider ces qualifications. Dans ce marasme, des alliances contre nature se constituent  au 2ème tour pour « l’emporter » (EELV, PCF, Parti de Gauche) et les « gens », désabusés, désertent le débat politique. C’est bien là ce qu’il faut combattre et c’est notre volonté aux AES, de faire en sorte que les « gens » reprennent le pouvoir, non pas dans des comités de quartier ou autres formules de concertation qui les cantonnent dans les trous à boucher ou les sens de circulation, mais en donnant leur avis sur les politiques d’éducation, de santé, de logement, ou encore en matière d’écologie, d’environnement, de production, d’industrie… là où ils vivent. C’est là où sont utiles des associations ou de nouvelles formes de regroupements (partis ou autres) qui leur permettront de s’inscrire collectivement dans la politique, la vraie, c’est-à-dire celle des choix d’organisation de la société dénonçant le capitalisme prédateur et destructeur qu’ils subissent. L’organisation des solidarités permettra également de faire des ponts entre les peuples du monde qui subissent les mêmes politiques, afin que ne prolifèrent ni l’exploitation des pays émergents ni les nationalismes racistes.   

Voila ce qui nous guide aux AES. Nous avons toujours été très ouverts à la participation de tous, syndiqués ou non, encartés ou non, jeunes ou non, « bronzés » ou avec un foulard ou non, français ou non, chômeurs ou non… tous ceux qui ne veulent plus être exploités, utilisés, manipulés, précarisés, regardés uniquement comme un « bulletin de vote », intoxiqués… C’est d’ailleurs la base de notre charte.

Odile Mangeot

Le 23 juin 2013                                  
A Jean-Jacques. Pour clarifier le débat et le poursuivre

Le Conseil d’Administration des AES, réuni le 10 juin, a débattu de ta (trop ?) courte contribution qui, pour partie, impute aux AES des opinions qui ne sont pas les leurs, en se focalisant sur un certain nombre de notions employées qui, prises hors de leur contexte, peuvent prêter à confusion. Pour les resituer, il convient de partir de l’analyse qui est la nôtre.

Nous sommes persuadés que la crise du capitalisme, la déroute théorique du néolibéralisme, les vaines tentatives pour s’en accommoder… provoquent dans le champ politique une décomposition-recomposition des « appareils » politiques « traditionnels ». Elle est activée par le rejet, la désaffection de l’électorat à leur égard face à leur « impuissance » apparente à lutter contre le chômage, la désindustrialisation, la précarité… L’électorat, pour les composantes qui ne s’abstiennent pas, se tourne par conséquent vers des solutions plus radicales à « gauche » comme à « droite » et exprime, de manière pour l’heure circonscrite dans le temps et dans l’espace, son mécontentement, sa protestation, voire sa colère.

J’entends par partis et organisations traditionnelles, ceux et celles qui, d’une part, se situent dans l’orbite des institutions de la 5ème République et s’accordent à penser qu’il n’y a pas d’alternative au néolibéralisme et au système capitaliste. D’autre part, j’y inclus ceux et celles qui restreignent la démocratie à ses aspects parlementaires ou de délégation de pouvoir. Il ne peut, à mon sens, y avoir de rupture avec le capitalisme sans une lutte des classes qui fraye la voie à des formes démocratiques nouvelles permettant aux ouvriers et aux couches populaires de prendre réellement leur destin en main[1]. Cette appréciation renvoie aux « insuffisances » des partis, façonnés pour concourir dans le cadre imposé par le système électoral, en dépendant financièrement et fonctionnant de fait comme des systèmes oligarchiques dont le sommet coopté sort de l’ENA ou des couches supérieures de la société. L’UMP et le PS en sont des exemples frappants et les exceptions ne font que confirmer la règle. L’appareil d’Etat et ces oligarchies partidaires, voire syndicales (comme la CFDT), organisent un certain consensus pour maintenir l’hégémonie de la classe dominante, y compris avec sa fraction la plus affairiste, ce qui n’est pas sans provoquer les scandales à répétition bien vite étouffés sous le verbiage moralisateur répudiant des brebis galeuses et présentant la « classe » politique comme parangon de vertu. En fait, « sans qu’ils soient tous pourris », la collusion entre le monde des affaires, l’Etat et les grands partis institutionnels est avérée, pour le moins sur le plan des idées et des mesures qu’ils prennent.   

Par ailleurs, si « l’idéologie dominante est l’idéologie de la classe dominante », cela signifie que la « base », les classes ouvrières et populaires en sont largement imprégnées. Ce constat justifie, par conséquent, la lutte politique et idéologique, la diffusion d’éléments d’éducation populaire suscitant des brèches dans le mode de pensée dominante. Ces brèches peuvent faire éclore de nouveaux engagements politiques étant entendu que la mobilisation, les manifestations, grèves… possèdent, à bien des égards, des effets de politisation bien plus massifs.

Il n’y a donc pas lieu, à mon sens, de réduire « notre analyse » à l’opposition entre des appareils et une « base mythique ». Il s’agit là d’une caricature ou, pour le moins, d’un étiquetage renvoyant notre association à la résurgence de je ne sais quel anarcho-syndicalisme (qu’il faudrait d’ailleurs décrypter dans ses contextes et ses variantes).

Ce qui précède repose sur une approche dynamique (ou dialectique) du processus de recomposition du champ politique. Il n’est pas anodin de constater (en Europe mais pas uniquement) l’émergence de nouveaux partis à « gauche » et à l’extrême droite et les conflits, scissions qui secouent les partis dominants, leurs alternances au pouvoir, voire leur union sacrée pour sauver le système lorsque les masses sont en mouvement (Grèce, Italie…). Ce qui ne signifie pas qu’à « gauche » la solution soit trouvée pour rejouer une gauche plurielle dans le cadre du système réaménagé. Les débats internes qui secouent Syriza en Grèce[2], voire ceux qui agiteront d’ici peu le Front de Gauche, en sont la preuve.

Croire qu’à terme « partis, syndicats et associations doivent converger », qu’ils appartiennent de fait à un « même camp », c’est s’illusionner sur leur nature et leurs capacités de s’adapter. Si la crise s’approfondit, si comme on peut le supposer, le précariat s’étend, si les mesures de régressions sociales s’accentuent malgré les protestations revendicatives, toutes les organisations en seront affectées, les unes se renforceront dans leur radicalisation, les autres connaîtront déchirements et délitement. En ce qui concerne ceux qui sont dans un même camp, les critères déterminants pour en faire partie seront dans l’immédiat les prises de position sur les contre-réformes des retraites, de l’indemnisation du chômage, la lutte contre les paradis fiscaux, la récusation des dettes illégitimes, la rupture avec l’obligation de transposer les directives européennes et avec le respect des traités européens et, en positif, la volonté d’extension du salaire socialisé, la réduction des inégalités et plus généralement l’opposition ouverte au gouvernement solférinien et sans aucun ménagement. Dans cette optique l’éducation populaire, la diffusion d’analyses à débattre sur la situation du moment sont susceptibles de préparer l’avenir en faisant émerger de nouveaux militants issus des couches populaires, en favorisant la clairvoyance de ceux qui « bien qu’encartés » ont le souci chevillé au corps de la « justice sociale et de l’égalité ».

Donc, tout porte à « croire » que les luttes vont s’aiguiser au sein des « appareils » comme en dehors (à moins d’une reprise conjoncturelle à la « croissance » que l’on ne voit guère venir), y compris lors des compétitions électorales prochaines. A cet égard, si notre charte (dans son état actuel) spécifie que nous n’avons pas vocation à y participer en tant qu’association, cela ne signifie nullement que nous ne pourrions jamais prendre position et encore moins interdire en notre sein à des militants ou adhérents d’avoir une double appartenance compatible avec la charte.

La conception que nous défendons repose à la fois sur le constat d’une « insuffisance » des forces à la gauche du Parti Solférinien et une vision gramscienne du champ politique. En d’autres termes, le champ politique, social, intellectuel est agité par des forces politiques qui, même si elles n’en ont pas le label, font bouger les lignes, recomposent ce champ. Pour ne citer que quelques exemples, il suffit d’évoquer le rôle joué par ATTAC vis-à-vis de la dénonciation des paradis fiscaux, de la financiarisation du système capitaliste ou par le GISTI, la Cimade, le DAL… dans les fonctions politiques qu’ils assument vis-à-vis des sans papiers, des travailleurs immigrés et des sans logements. Nous considérons donc que, par nos actions, interventions, nous avons cette vocation politique à faire bouger les lignes, et ce, en toute modestie... compte tenu des obstacles à surmonter qui tiennent à la morosité de la conjoncture présente.

Sur les autres questions abordées dans ta contribution, je ne m’y attarderai pas dans le présent texte, sauf pour souligner ce qui, pour moi, relève de quelques évidences.

Lorsque la classe dominante, et ceux qui la servent, apparaissent décidés à faire payer la crise aux travailleurs et par conséquent à rembourser les créances de l’Etat (plus de 1 800 milliards d’euros), il y a lieu de craindre qu’au-delà des mesures de diminution des prestations sociales, le précariat s’étende. Il est concentré pour l’essentiel dans les quartiers populaires de relégation, désertés par les partis politiques « traditionnels ». Leurs populations sont stigmatisées, victimes du racisme, c’est ce qui a pu nous déterminer à agir dans leur direction[3]. D’autres franges sont touchées par cette paupérisation larvée, dans le monde rural ou dans les zones pavillonnaires. Agir dans leur direction c’est affirmer que, de leur politisation sur des bases antilibérales voire anticapitalistes, doit advenir « un autre monde possible » et qu’elles doivent en être les acteurs.

S’agissant de l’égalité hommes-femmes, dans ce cadre, nous devons surtout nous préoccuper de celles qui subissent le travail partiel contraint, les inégalités salariales, la domination machiste[4]… Et dans tous les cas, lutter contre les mesures de discrimination qui interdisent l’accès à l’école de jeunes filles voilées, une toute petite minorité dont l’islamophobie s’est emparée. D’autres moyens que l’exclusion auraient été possibles ![5]

Sur la « défense » de la Sécurité Sociale, je ne puis qu’opiner, tout en soulignant qu’il y aurait lieu d’en souligner les imperfections et limites, y compris dans son application après la guerre. Mais ce débat renvoie à la conception de la transformation sociale à faire advenir et plus précisément à l’extension du salaire socialisé.

Fraternellement
Gérard,
Le 12 juin 2013          



[1] A ce propos, lire de Nicos Poulantzas « l’Etat, le pouvoir, le socialisme » réédité par les Praires ordinaires. Il est édifiant.
[2] Lire à ce sujet l’excellent article du Monde Diplomatique du mois de juin de Baptiste Dericquebourg sur Syriza « Prendre le pouvoir sans perdre son âme ».
[3] Voir mon texte pré-bilan à ce sujet
[4] Lire l’excellent travail de terrain réalisé par Saïd Bouamama, retracé dans le livre collectif « Femmes des quartiers populaires » édition le temps des cerises
[5] A ce sujet, lire l’ouvrage du marxiste Pierre Tévanian « La haine de la religion » aux éd. la Découverte
Jean-Jacques Angot, adhérent AES, le 9 juin 2013

 Le texte joint à la convocation du CA précise certains points mais laisse totalement sans réponse la question principale que j'ai voulu poser lors de l'AG. Pourtant elle figure en toutes lettres : "qu'entendons nous par force politique ?". Mais derrière la question le texte maintient un flou incompréhensible. Parfois on a l'impression que l'objectif est le simple développement des AES, mais je préfère entendre que c'est un vaste mouvement anti-capitaliste dans lequel se reconnaîtrons des tas de gens. Si c'est bien cette deuxième réponse qui est la bonne, je crois qu'il faut que les AES arrêtent d'opposer ceux qui sont dans des "appareils" et une base mythique. Il y a dans ce pays, fort heureusement, des centaines de milliers d'encartés qui au quotidien comme dans les grandes occasions participent à la lutte pour l'émancipation

Je suis bien d'accord pour ne pas opposer le rôle des "partis", syndicats et associations, toutes les formes d'organisation doivent à terme converger dans un même mouvement de remise en cause de l'ordre capitaliste et une même volonté de prise en main de nos affaires. La diversité des organisations, dans leurs formes comme dans leurs prises de position, ne doit pas faire perdre de vue que toute celles qui se retrouvent dans les divers mouvements de contestation de cette société, sont en fait dans un même parti, là pas au sens de même organisation, mais dans un même camp qu'il faut construire.

De même que je ne crois pas à une opposition entre base et militants organisés, je ne crois pas qu'il faille renoncer à une quelconque forme de lutte, la manif, le vote... sont aussi des moyens dont s'emparent les dominés quand ils le peuvent, le veulent. Je respecte le choix de l'association à laquelle j'ai adhéré de ne pas avoir vocation à participer aux élections, mais personnellement je fais le choix de travailler pour que les exploités, les dominés puissent se faire entendre aussi dans les élections, ce qui participe à la création d'un rapport de force plus favorable.

Dans le texte d'orientation il est affirmé à juste titre que "les forces de transformation se développent et tentent de converger", en opposant cela aux fissures dans les partis libéraux ou sociaux libéraux. Par contre l'affirmation du "rejet des partis traditionnels" et plus ambigus, ce n'est pas la même chose quand le Front de Gauche, Syriza, Unidad Izquierda progressent que quand on assiste au succès de Beppe Grillo.

Je veux croire que les convictions exprimées ci-dessus ne sont pas contradictoires avec l'adhésion aux AES, ni d'ailleurs avec la charte de notre association. Même si je souhaiterais qu'un jour on clarifie cette question de la "force politique à construire".

Le second débat de l'AG autour du paragraphe sur "une société de justice sociale et d'égalité" est beaucoup plus confus pour moi. Peut-être en parti est-ce un  faux débat à cause de ma méconnaissance de toute l'activité de notre association. Je vais juste me contenter d'avancer là aussi quelques convictions, tout en espérant qu'elles ne font pas vraiment l'objet de contradictions entre nous et si c'était le cas pour certaines, je crois qu'il faut de la  diversité au sein des AES :

- ne mettre l'accent que sur les "quartiers" me paraît bien trop réducteur, de même de ne voir comme problème pour l'égalité que celui lié aux origines des populations. Je crois que la bataille pour l'égalité hommes-femmes est essentielle, que la bataille contre l'homophobie ne doit pas nous être négligée. Enfin je crois que la défense, la reconquête  de la Sécurité sociale est la bataille essentielle du combat anti-capitaliste, au côté des autres batailles pour les biens communs et la gratuité des services essentiels.


- ok avec les affirmations du texte joint à la convocation sur la laïcité, à ne pas confondre avec une "guerre" contre les religions et encore moins avec l'Islamophobie. Par contre je suis, au nom du droit des femmes, contre le port du voile à l'école (notamment) et du Niquab (qui d'ailleurs n'a rien à voir avec la religion) dans tout l'espace publique, ces prises de position me semblent tout à fait cohérente avec un anti-racisme sans faille.
Suite à l'AG des AES, une discussion s'est engagée entre quelques militants dont vous trouverez ci-dessous les contributions.


Aux participants à l’AG du 26 mai 2013 et aux membres du nouveau CA des AES

La première réunion des membres élus du Conseil d’Administration lors de notre AG du 26 mai 2013 se tiendra le lundi 10 juin à 20h chez Gérard.

Les remarques et notes qui suivent ne sont pas un compte rendu de l’AG mais entendent soulever un certain nombre de questions non résolues que membres du CA et militants inscrits dans les différents groupes des AES devraient approfondir. En effet, bien qu’ils aient été riches et conviviaux, nos échanges peuvent avoir donné un goût d’inachevé. Ils doivent se poursuivre notamment avec les nouveaux adhérents. Ainsi, l’accord sur la charte aurait pu faire l’objet d’une rediscussion. C’est ce qui est apparu lors de l’examen du rapport d’activités qui a dérivé sur le texte d’orientations qui, lui-même, n’a pas fait l’objet, comme espéré, de pistes d’actions sur les quatre axes proposés.

Le CA, tout comme les groupes, pourraient par conséquent se prononcer sur les interrogations suivantes pour en éclairer le contenu.

1 – Qui sommes-nous ? Que voulons-nous ? Qu’entendons nous par force politique ? 
Par nos actions, les débats que nous suscitons, (selon la charte) nous entendons participer à l’émergence d’une culture politique de contestation du système par en bas (hors appareils), de soutien aux luttes des classes populaires et de propositions de transformations sociales et politiques. Dans le secteur, nous sommes les seuls à faire cette démarche auprès de ceux qui, soit ne sont pas des encartés, soit ne se reconnaissent pas dans l’action des partis, ou encore n’y trouvent pas leur compte en matière d’échanges. D’une certaine façon, nous récusons la spécialisation ou plutôt la séparation entre les partis qui s’occuperaient de politique et les associations et syndicats qui « feraient » du social revendicatif. La politique non politicienne est l’affaire de tous. Cette perspective va à l’encontre des partis qui, même s’ils se disent de gauche, sont dirigés nationalement par des experts, voire des mandarins. Cette réalité est bien évidemment à nuancer vis-à-vis de « l’extrême » gauche ou du Front de Gauche, quoique le poids des appareils centraux ne saurait être négligé. Ainsi, le Front de gauche, cartel d’organisations ne permet (toujours) pas l’adhésion individuelle directe, seules les adhésions aux partis le composant sont possibles. Notre démarche prend donc en compte cette réalité et la nécessité d’une large politisation permettant à n’importe qui de comprendre les enjeux de la période pour défendre, proposer des idées de transformation sociale de rupture avec le système capitaliste. C’est là notre originalité.

Nous sommes des laïcs, partisans de la nette séparation de l’Etat et des Eglises quelles qu’elles soient et donc pour l’abrogation pure et simple du Concordat en Alsace-Lorraine. Mais notre lutte n’est pas antireligieuse dans la mesure où les croyances restent du domaine privé. Toutefois, les religions ne sont pas imperméables à la lutte et aux aspirations des dominés (théologie de la libération en Amérique latine…) ce qui rend souvent la question plus complexe d’autant que le racisme anti-arabe prend la forme de l’anti-islamisme, lui-même conforté par le recours au terrorisme et aux politiques suivies notamment par l’Arabie Saoudite, les pays du Golfe ou l’Iran.     

Le texte d’orientations et ses 4 axes présentés avaient pour objet de susciter des propositions d’actions et des thèmes de débats à programmer afin que le CA puisse les mettre en œuvre. Certains de nos amis l’ont compris comme un texte politique à approuver, à enrichir. Il était certes incomplet comme cela fut souligné, notamment en ce qui concerne la justice sociale… quoiqu’il partait de notre pratique antérieure (lutte contre le racisme, les violences policières…). Ce constat doit amener tous ceux qui veulent enrichir le débat à prendre leur plume, à faire circuler des textes comme nous le faisons déjà, y compris sur notre blog. Le CA pourrait jouer, à cet égard, un rôle de régulateur des échanges et des expériences (comme celle de la ZAD du Morvan soulevée par Jean François et Hassen).

2 – Des actions à programmer et des initiatives à prendre

Ce qui suit est une énumération incomplète et des pistes à préciser.

Actions :
-          Marche des chômeurs -passage à Belfort le 24 juin prochain. Que faisons-nous ?
-          Situation à l’usine « Parisot » à St Loup : analyse, intervention ?
-          Quel regroupement à Aillevillers ?
-          Suppression programmée du SMUR à Lure

Débats :
-          Foire bio à Vuillafans (près d’Ornans) les 7 et 8 septembre : un débat avec Hervé Kempf ?
-          Laïcité et religions
-          La précarisation de la société : Serge Paugam à Vesoul ?
-          Reculs programmés par le gouvernement : retraites, indemnisations chômage…
-          Exploitation de l’uranium en Afrique
-          Situation au Mali
-          Néolibéralisme austéritaire au Portugal, en Grèce, en Espagne


Bref, le CA, les groupes ont du « pain sur la planche ». Mais l’important… c’est que tous, en s’écoutant, en échangeant, en lisant, en écrivant, acquièrent cette nécessaire culture politique de débat afin qu’elle ne soit plus confisquée par la minorité d’experts. Agir dans ce sens par la réflexion et l’action ne vise qu’à redonner la parole au peuple.


Gérard, le 30 mai 2013  

vendredi 28 juin 2013

J-3: L’Égypte de toutes les tensions

La campagne "Tamarod" (Rébellion) initiée par l'opposition mais dont s'est saisie une foule de jeunes et citoyens ordinaires en en faisant tout autre chose, a réussi à réunir 15 millions de signatures désavouant la légitimité électorale de Morsi qui n'a été été élu que par 13,2 millions d'électeurs.
Les divers animateurs de cette campagne ont convié les égyptiens à manifester le 30 juin pour exiger le départ de Morsi. Les dirigeants de l'opposition du FSN demandent pour cela des élections présidentielles anticipées tandis qu'une multitude de groupements de jeunes et de révolutionnaires affirment qu'ils ne quitteront pas la rue tant que le président n'aura pas quitté ses fonctions. Les premiers voient dans le 30 juin une fin à but institutionnel, pendant que les seconds y voient, eux, un début de la démocratie directe, le début de la fin.

Alors que les égyptiens subissent une forte pénurie d'essence ( qui amène certains automobilistes à faire trois jours de queue pour un plein), de gaz, d'eau, de nombreuses coupures d'électricité et d'eau, des hausses de prix très importantes des produits de première nécessité et que les grèves et manifestations à caractère social ou économique battent des records historiques, la perspective du 30 juin semble pouvoir cristalliser pour cette période toutes les colères en un seul mouvement.
A trois jours de cette échéance qui paraît déterminante pour des millions d'égyptiens, les tensions ne cessent de monter et de se fédérer pendant que bien des autorités institutionnelles quittent le navire présidentiel ou prennent des distances avec lui, alors qu'ils le soutenaient jusque là clairement ou à leur corps défendant.
Ainsi le pape des coptes a autorisé ses fidèles à se rendre au 30 juin, la prestigieuse université islamiste Al Ahzar a pris ses distances pendant que ses sheicks appellent ouvertement à manifester contre les faux musulmans au pouvoir, le principal parti salafiste Al Nour a déclaré qu'il ne participerait pas aux contre-manifestations de soutien à Morsi, le dirigeants des chiites égyptiens, Hasheni, a appelé ses ouailles à se venger des sunnites ( les Frères Musulmans) car quatre d'entre eux viennent d'être assassinés par ces derniers et enfin le leader dissident des frères Musulmans, Al Fotouh, ( 4ème aux présidentielles) dans une position jusque là de soutien critique, a appelé également à la manifestation du 30 juin.
En même temps, l'armée qui était silencieuse depuis l'échec de sa tentative de coup d’État en juin 2012 et qui avait laissé la place aux Frères Musulmans, s'est réinvitée dans le débat politique par le biais de son homme fort, le ministre de la Défense Al Sissi, en déclarant qu'elle ne laisserait pas l’Égypte sombrer dans le chaos en défendant les institutions d’État contre tous ceux qui veulent les saper ou les détruire. Son discours a été interprété par l'opposition comme un lâchage des Frères Musulmans et par ces derniers, au contraire, comme un soutien.
Ces derniers mois, plusieurs petites manifestations de soutien à l'armée initiées par des anciens du parti de Moubarak mais avec le soutien d'un certain nombre de libéraux ou démocrates ont montré que le retour de l'armée au pouvoir était une possibilité envisagée par certains notables dans cette situation de dangereuse montée sociale pour eux et où les Frères Musulmans et la religion ne pourraient plus être suffisants comme gardiens de l'ordre. En effet, ils ont été discrédités par un an de pouvoir, ayant perdu tous leurs soutiens traditionnels dans les syndicats professionnels des classes moyennes, des médecins aux ingénieurs en passant par les enseignants, pharmaciens, avocats ou journalistes et surtout les étudiants et n'en ayant jamais réellement eu chez les ouvriers.

Aussi, après la déclaration menaçante de Al Sissi, on a vu non seulement Morsi déclarer 5 fois dans son discours d'hier 26 juin, que c'était lui le chef de l'armée, style méthode Coué, et les principaux dirigeants du FSN dire leur indéfectible attachement à l'armée y compris le dirigeant démocrate du mouvement du 6 avril qui n'est décidément plus ce qu'il était tout comme Hamdeen Sabbahi, dirigeant socialiste nassérien, arrivé troisième aux élections présidentielles, qui s'est abaissé à dénoncer ceux qui avaient critiqué l'armée quand elle était au pouvoir comme étant les responsables de la crise actuelle. A la plus grande surprise et au plus grand dam de ses partisans...

De son côté, étayant les craintes des possédants, la Fédération égyptienne des syndicats indépendants revendiquant plus d'un million de membres, vient de faire paraître un communiqué signé en commun avec le groupe trotskyste des Socialistes Révolutionnaires appelant tous deux au 30 juin, déclarant "nous sommes à la veille d'une nouvelle révolution populaire" [...] rappelant "les jours avant la chute de Moubarak". Ce communiqué a tout de suite été interprété par la presse comme un appel des syndicats ouvriers à une deuxième révolution. Le syndicat des journalistes s'est aussitôt associé à la démarche appelant lui aussi au 30 juin.

Les groupes défendant les droits des femmes ont été plus loin appelant les femmes d’Égypte non seulement à manifester le 30 juin mais aussi à s'armer d'aiguilles à matelas ( de la taille de véritables couteaux) pour se protéger de tout harcèlement.

En même temps, 18 groupes islamistes soutenant le gouvernement, ont appelé à des contre manifestations du 21, puis du 28 au 30 juin, certains d'entre eux menaçant de mort les manifestants anti Morsi, disant clairement qu'ils formeraient leurs milices d'auto-défense et le montrant ouvertement le 21 juin, défilant avec gourdins, boucliers et casques et encore hier 26 juin à Monofiya... Mais hélas pour eux, arrosés par les habitants des rues où ils défilaient, de jets d'objets divers, eau ou urine.
Dans cette montée des tensions, la nomination par Morsi la semaine passée de 6 nouveaux gouverneurs des Frères Musulmans et celle d'un dirigeant de l'organisation terroriste Al Jamaa Al Islamiya mettait le feu aux poudres. Les sièges des gouvernorats étaient assiégés et des manifestations ont eu lieu à Fayoum, Mansoura, Mahalla, Suez, Port Saïd, Alexandrie, Le Caire, Fouah, Gizah, Luxor... faisant de nombreux blessés. Depuis, le gouverneur de Luxor d'Al Jamaa al Islamiya, a renoncé mais les manifestations continuent. Mercredi 26 juin, de très violents affrontements opposaient anti et pro Morsi à Tanta, faisant 157 blessés mais surtout à Mansoura où deux Frères Musulmans ont trouvé la mort et 250 personnes ont été blessées. En même temps plusieurs véhicules ou magasins appartenant à des Frères Musulmans ont été brûlés dans cette ville et un supermarché de la chaîne Zad appartenant au fils de Khayrat al-Shaker, multimillionnaire et homme fort des Frères Musulmans, a été pillé, ses marchandises jetées dans la rue.
A Zarqiya, deux manifestations bloquaient mercredi 26 juin le siège du gouverneur et la maison de Morsi, après que déjà mardi, le siège du Parti de la Justice et la Liberté ( Frères Musulmans) ait été brûlé. On notait 56 blessés dans les affrontements à Zagazig. Neuf l'étaient également hier place Tahrir par balles de revolver.

Dans ce climat, des rumeurs de toutes sortent circulent pendant que des nouvelles plus ou moins contrôlées sont publiées dans la presse. Un dissident des Frères Musulmans affirme que ces derniers ont programmé pour les jours qui viennent l'assassinat ciblé de leaders de l'opposition, une mère islamiste dénonce son fils à la police parce qu'il préparait en quantité des cocktails molotov pour le 30 juin, les étrangers fuient l’Égypte, les routes menant à l'aéroport du Caire étant totalement embouteillées, les employés du journal El Watan ( celui qui avait fait campagne contre le Canard Enchaîné au sujet des caricatures de Mahomet) ont quitté leurs locaux ayant été menacés d'incendie. Des blocs de ciments ont été placés aux entrées du palais présidentiel par la garde présidentielle.

C'est dans ce contexte que hier mercredi 26 juin, de nombreux chars de l'armée ainsi que des parachutistes ont pris position aux abords des bâtiments officiels ou des zones "sensibles" de nombreuses villes "pour protéger la population", dit-elle, et que des hélicoptères "Apaches" volaient à basse altitude au dessus des cités, contribuant un peu plus à faire monter la tension.
Les jeunes animateurs de la campagne Tamarod ont déclaré qu'ils ne voulaient en aucun cas que l'armée prenne le pouvoir pendant que place Tahrir hier soir, 26 juin, la foule qui s'était rassemblée pour écouter le discours présidentiel télévisé était unanime pour conspuer Morsi, lui demander de "dégager", lui montrer ses chaussures, et le traiter de "clown"," paranoïaque", ou déclarer qu'il faudrait "vendre son cerveau à la science" pour combler les dettes de l’Égypte tellement c'était un phénomène psychiatrique unique... Par contre elle se divisait sur l'armée certains chantaient le vieux slogan des débuts de la révolution " le peuple et l'armée une seule main" pendant que d'autres la dénonçaient, notamment les Socialistes Révolutionnaires, scandant "ni Frères ni Armée".

Jacques Chastaing, 27 juin 2013






lundi 24 juin 2013

Ci-dessous, l'édito du prochain ACC

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Entre fanfaronnade et crainte

Bruxelles l’a exigé, Hollande s’exécute à petits pas. Le rapport Moreau a rendu de «neutres» conclusions. La 4ème contre-réforme des retraites après celles de Balladur, Raffarin, Fillon, est sur la table. De 37,5 annuités à 41 en 2012, il en faudrait désormais 43 voire 44 pour espérer une retraite à taux plein. C’est le prix de 7 milliards à trouver.

Pour y parvenir, les socialos comptent claironner que l’âge légal du départ à la retraite reste inchangé et comme l’allongement de la durée du travail n’y suffira pas, la baisse des pensions par la désindexation paraîtra indolore. Quant à la hausse de la CSG, la fin des abattements fiscaux pour les parents ayant 3 enfants et plus, il leur faudra trouver d’autres arguments et du savoir-faire politicien pour faire oublier qu’ils étaient contre les « réformes » précédentes ainsi que leur capitulation devant le Medef refusant toute hausse des cotisations patronales.

Ils vont également nous bassiner avec leur « courage » gestionnaire pour restreindre la durée d’indemnisation du chômage trop longue à leur goût, au plafond trop haut, pour introduire sa dégressivité en espérant que nombre de chômeurs basculent dans la catégorie des minima sociaux et disparaissent des statistiques du chômage.

Hollande l’a assuré à ses ministres : «Un mouvement social d’ampleur est évitable». Regardez l’accord de l’insécurisation de l’emploi, c’est validé sans trop de remous ! Sa méthode : dépolitiser le débat par expert interposé, se présenter en bon gestionnaire et déminer le terrain social et politique. Rassurer d’abord : «Aucune décision n’est prise», et, en bon Ponce Pilate, s’en remettre à la conférence sociale, à la bienveillance des collabos qui ont déjà sévi. Ces petits calculs politiciens des mauvais coups assénés pendant l’été suffiront-ils ? Pas sûr ! C’est pourquoi Hollande veut éviter la mobilisation des bataillons de la SNCF, d’EDF et de certains services publics. Donc, pas touche aux régimes spéciaux et au mode de calcul des retraites des fonctionnaires ?


N’empêche, des députés s’affolent tel Menucci : «La retraite c’est le patrimoine des Français qui n’en ont pas !» ou la bande à Bartolone : attention ! «Le climat est anxiogène, la retraite peut être le point de basculement», il faut éviter le «risque d’un mouvement social». Quant à Ayrault il en reste à la langue de bois : ces «réformes» de «justice» permettront de «construire un modèle de gauche durable» ( !). Hollande se rêvait en Schröder mais il risque de se réveiller en Papandréou car ses recettes prises dans les poches du peuple ne juguleront pas la récession et seront insuffisantes pour rembourser la dette de 1 800 milliards ! Il ne lui reste qu’à naviguer entre fanfaronnade et crainte tout en agitant la peur du FN, assurant ainsi sa progression. Pas très réjouissant l’avenir des socialos confrontés aux prochaines élections… mais d’ici là le ciel social se sera peut-être éclairci.          

19 juin 2013
Les blogs du « Diplo » - La pompe à phynance

De la domination allemande (ce qu'elle est, et ce qu'elle n'est pas)

par Frédéric Lordon
L'Allemagne prendra-t-elle bientôt conscience du ressentiment croissant dont elle est l'objet - non pas seulement dans les pays du Sud, dont, par une sorte de « racisme économique », elle se moque comme d'une guigne, mais au coeur même de l'Europe, et notamment en France ? Car tous les cantiques à la sacralité du « couple franco-allemand » n'empêcheront pas que quelques vérités pénibles finissent par faire leur chemin, d'abord dans les marges, où il est plus facile de les assigner à leur condition de réprouvées, mais bientôt beaucoup plus largement. L'Europe supposément communauté de peuples égaux est sous la domination d'un seul - avec, il est vrai, la validation passive du poltron décisif, la France -, voilà la disgracieuse réalité européenne présente. Encore faut-il ne pas se tromper lorsqu'on parle de « domination allemande », car si le fait lui-même est avéré, la nature du fait demande à être précisée
Et d'abord que veut dire « l'Allemagne » ? Car ce ne sont pas toujours les mêmes entités qui se trouvent engagées dans les divers énoncés auxquels peuvent donner lieu l'idée de « domination de l'Allemagne ». Parle-t-on de domination industrielle ? Ce n'est pas la domination de l'Allemagne-nation, c'est la domination de l'Allemagne-capital, comprendre : du capital allemand - et ça n'est pas tout à fait pareil. En proie à leurs élans de puissance caractéristiques, et en cela semblables à leurs homologues de tous les autres pays, les entreprises allemandes s'efforcent d'éliminer leurs concurrents, luttent pour la capture de la plus grande part de marché et, conformément à la pure et simple logique (en tant que telle a-nationale) du capital, cherchent systématique ment l'avantage compétitif susceptible de leur assurer la suprématie économique. Il n'est besoin d'aucune hypothèse supplémentaire pour rendre raison de ce fait, besoin d'invoquer aucune pulsion nationale de domination, puisque en l'occurrence la pulsion de domination est inscrite au coeur même de la logique du capital et, portée par les entités privées du capital, se suffit amplement à elle-même. Aussi peut-on dire qu'il y a assurément projection de puissance des pôles capitalistes allemands, mais hors de tout projet national de puissance (...)
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