Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mardi 7 août 2012

Un capitalisme en voie de putréfaction ?

Un capitalisme en voie de putréfaction ?

En examinant la presse quotidienne du 15 au 23 juillet, l’on découvre quelques perles malodorantes pourvu qu’on les compile. Elles ne font ni la une des journaux télévisés, ni l’objet des commentaires autorisés des journalistes de connivence. Et pourtant, l’arnaque au Libor et à l’Euribor est de taille ! Mais pourquoi donc ces révélations tardives alors même que cette affaire est connue depuis 2008 ? Au vu d’autres spéculations, prévarications, l’entreprise dite de moralisation du capitalisme semble insurmontable tant sont nombreux les parasites qui gangrènent le système. Et si ce n’était que son cours normal ? Pire, il semblerait que les parangons de vertu  soient les plus cyniques. A New York et ailleurs, la léthargie des masses manipulées semble dater d’une autre époque. Pour ceux, lucides mais fatalistes ou apathiques devant l’ampleur de la crise et de ses conséquences, cet article souhaiterait transformer leur aigreur en volonté de combattre ce monde de rapine.

1 – Le décor

Commençons par l’arnaque au Libor et à l’Euribor et par les définitions qui s’imposent pour en comprendre l’ampleur.

Afin que les banques se prêtent entre elles, avec la confiance des plus mesurées qu’elles s’octroient, un  taux de référence interbancaire est établi par la City de Londres. A partir des estimations déclaratives basées sur la confiance… une agence financière les compile et fixe une moyenne permettant aux établissements financiers de se situer les uns par rapport aux autres. C’est le Libor. En fait, il vaudrait mieux en parler au pluriel dans la mesure où les taux du Libor portent sur 10 devises différentes et, pour chacune d’entre elles, sur des durées de prêts s’étalant d’un jour à 12 mois et sur des transactions se montant à des millions de milliards de dollars. A ce stade, l’on commence à mesurer l’ampleur du casino et sa vulnérabilité à la manipulation. Surtout en période de crise financière où la suspicion est de mise et nombreuses les raisons de maquiller les taux déclaratifs pour apparaître en bonne santé. Puisque l’on se prend soi-même la température, il vaut mieux manipuler le thermomètre pour qu’il n’indique jamais la fièvre au risque d’être mis en faillite, voire nationalisé. Car tout le système est sur les dents : plus le Libor est élevé, plus les banques sont craintives et ont tendance à fermer le robinet du crédit. En d’autres termes, le Libor comme l’Euribor sont en quelque sorte le baromètre mesurant la nervosité du système financier, tiraillé qu’il est aujourd’hui, bien plus qu’hier, entre l’insatiable appât du gain et la frayeur de perdre.

2 – L’arnaque

Le 6 juillet dernier, l’office britannique de lutte contre la délinquance financière s’est décidé (enfin ?) à ouvrir une enquête pénale. Et l’on apprend ainsi que les taux interbancaires ont été manipulés avec la complicité de la banque centrale d’Angleterre. Les banquiers voleurs vont-ils se retrouver derrière les barreaux ? Pourquoi avoir attendu 2012 pour une arnaque qui aurait débuté en 2008, en pleine crise financière ?

Avant de tenter de répondre à ces questions, il convient de revenir sur la genèse de l’affaire qui a éclaté en 2008. Comme l’indique Paul Jorion[1], «personne ne s’en soucie», «la presse fut laconique», «elle n’avait provoqué qu’un froncement de sourcils». Et maintenant, une fronde médiatique sans précédent et le chancelier de l’Echiquier qui s’indigne : «les faits révélés sont symptomatiques d’un système financier qui a élevé la cupidité par-dessus toute autre considération et a mis notre économie à genoux». Diantre ! Presque 4 ans pour s’en apercevoir ! Paul Jorion attribue ces révélations tardives à la colère de ceux d’en bas qui, depuis l’affaire Murdoch[2], n’en peuvent plus de la corruption qui règne dans les cercles dirigeants à l’arrogance insupportable et qui, finalement, ont cessé de croire à la mondialisation heureuse.

Mais, en fait, ne s’agissait-il pas de peccadilles ? Pour la banque Barclays, la seule à coopérer pour l’instant avec les autorités, la seule à n’avoir pas bénéficié du renflouement par le gouvernement britannique, l’une des seules à ne pas avoir été nationalisée[3], bien qu’au vu de sa fragilité, le gouvernement y songeait, il s’agissait ni plus ni moins que d’occulter sa mauvaise santé pour pouvoir bénéficier des taux interbancaires avantageux en déclarant des taux moins élevés qu’en réalité. N’a-t-elle pas admis avoir commis ces «vols d’intérêts» à répétition des centaines de fois ? Certes, des milliers d’emprunteurs ont été soumis à des taux d’intérêt faussés, mais, stupeur, l’on découvre que bien d’autres établissements financiers sont impliqués dans les mêmes combines juteuses : la Royal Bank of Scotland, la Lloyds Bank, la Deutsche Bank, les américaines City Group, JP Morgan et même la Suisse UBS. La gangrène est partout. Et cette escroquerie consistant à truquer les taux d’intérêt sur des produits financiers d’une valeur (excusez du peu !) de 450 000 milliards de dollars aurait rapporté aux fraudeurs 22 milliards de dollars et fait perdre 11 milliards à 11 banques. L’Euribor[4] aurait été manipulé de la même manière et des traders organisés en réseau, installés dans des banques concurrentes, auraient participé à la goinfrerie générale en spéculant sur les différences de taux dont ils connaissaient les manipulations. Evidemment, les dirigeants des banques n’ont rien vu, la hiérarchie était aveugle, les superviseurs regardaient ailleurs, les initiés infiltrés seraient donc les seuls fautifs ! A voir, car la voyoucratie en col blanc est désormais empêtrée dans ces scandales.

3 – Règlement de comptes à OK Banco ?

Suite à l’apparition du scandale Barclays, trois des plus hauts dirigeants de cette banque ont démissionné. Le plus gradé de ces bancocrates, Bob Diamond, celui qui déclarait, plein de morgue et de suffisance en 2011 que «la période des remords et des excuses des banques est terminée», se trouve désormais sur le banc des accusés. Grand seigneur, il est parti avec 2,5 millions de dollars et l’escroc généreux de déclarer qu’il renonçait à ses 31 millions de bonus équivalents à 12 mois de son salaire… Lui qui se croyait quitte,  le voila trahi par ses coups de téléphone au n° 2 de la Banque Centrale d’Angleterre Paul Turker. Et pourtant, qu’en langage codé cela fut dit : «Il n’est pas toujours nécessaire que (votre) banque affiche des taux aussi élevés». Bref, c’était un feu vert pour truquer les taux à la baisse. A celui qui déclarait ne rien savoir de l’arnaque, la vieille règle consistant à « ne pas affranchir les caves», n’avait servi à rien. Quant à l’autre, son comparse, chargé de réguler, de moraliser les marchés, il était pris la main dans le sac. On ne sait (pas encore) ce que lui valut ce feu vert ( !) et jusqu’où remonte la connivence… Devant les parlementaires, sommés de s’expliquer, Bob Diamond et son collaborateur Del Rissier se sont écharpés. Ce dernier a craché le morceau : «M. Diamond m’a dit qu’il y avait des pressions politiques autour de la santé de Barclays et que nous devions déclarer un taux plus bas», «c’était une instruction». D’où venait-elle ? Faut-il remonter jusqu’au 1er Ministre Cameron ? Arrogant, mais se disant inquiet, Bob Diamond a fait le mal pour un bien, a-t-il expliqué «La banque mal en point devait payer des taux plus chers que ses concurrents pour se financer auprès du marché interbancaire». Comprenez «si ça se voit», «les marchés vont couler Barclays». «Fallait sauver la banque» cette poule censée pondre des œufs d’or pour les gardiens du temple assurant la domination de l’oligarchie financière. Quel rôle jouaient ces gens et que risquaient-ils ?

4 - La pourriture, laboratoire de la vie ?

Comparer ce qu’en disait Karl Marx avec les propos tenus par les financiers qui désertent Wall Street clandestinement pour rejoindre le camp des Indignés états-uniens[5] est révélateur. Commençons par citer l’illustre barbu[6] : ce sont des parasites qui exploitent la séparation entre l’acheteur et le vendeur, entre les producteurs (salariés) et les consommateurs au moyen de transactions fictives avant l’échange définitif. Ces rapaces sont des «fanatiques de l’accumulation». Ils font partie de «ces gens exclusivement occupés à manger le travail d’autrui sous forme de rente foncière, d’intérêts, de dividendes, etc.». Dans l’histoire de l’exploitation humaine «la pourriture, comme dans la nature, est le laboratoire de la vie».

Que disent d’autre ces déserteurs de la finance qui, clandestinement, tentent avec les Indignés d’Occupy Wall Street, de créer une banque éthique, «l’Alternative banking» ? «Les banquiers sont devenus des prédateurs, des parasites». «Ils sont capables du pire» en particulier «des campagnes de calomnies» pour nous descendre. «Tous les pouvoirs et toutes les richesses sont confisqués par une petite élite». «Tout est permis : start-up fantômes, patrons surpayés, blanchiment d’argent». «La finance récompense en priorité des psychopathes asociaux». « Ce sont des requins qui exploitent les populations précaires ». Mais enfin, le Marché ? «C’est un gros tas de fric confisqué par quelques individus». Diantre ! N’y aurait-il pas quelques exagérations dans ces propos que l’on croirait sortis de la bouche d’un bolchevik ?

5 – La gangrène en expansion

Eh non ! La réalité dépasse toujours les esprits les plus imaginatifs. La gangrène s’est en fait diffusée dans toutes les hautes sphères de l’économie capitaliste sans que l’on ne voit poindre ne serait-ce que l’once d’un remède efficace employé pour stopper la contagion. La rapacité et la certitude de l’impunité semblent bien être les deux mamelles du système en crise. Des exemples, il y en a à foison.

JP Morgan avait été compromise, hier, dans la manipulation du marché de l’énergie en Californie et dans le Midwest. N’est-elle pas blanchie aujourd’hui ? Ses pertes spéculatives (dans la crise de 2007-2008) de 5,6 milliards de dollars n’ont-elles pas été compensées ? Alors que maintenant la Deutsche Bank et 20 autres établissements financiers soient impliqués dans la manipulation du Libor et de l’Euribor et qu’une enquête soit ouverte n’est guère pour nous rassurer. D’ailleurs, comme pour en excuser l’énormité, comme pour banaliser ces prédations, la presse états-unienne de déclarer : «la divulgation d’informations confidentielles par les banques au profit de clients privilégiés ou de fonds spéculatifs est une pratique répandue». Bref, l’argent va à l’argent ! Et, en cette période de crise, il n’y pas de petits gains qui ne fassent les grandes fortunes. Ainsi les fournisseurs de cartes bancaires US, visa, mastercard et les grandes banques n’ont pas hésité à «surcharger» les frais de leurs clients, les ponctionnant sans vergogne sur toutes leurs transactions. Pour éviter tout procès malencontreux, cette escroquerie a été négociée. Bah ! Une amende de 7 milliards de dollars, qu’est-ce ?

Dans le même esprit, l’on nous assure que la banque britannique HSBC est sur le point de parvenir à un accord avec le gouvernement fédéral US sur le montant de l’amende à verser pour éviter toutes poursuites pour blanchiment d’argent issu du trafic de drogue. Ce qui est fâcheux en l’espèce, c’est désormais la connaissance que le public commence à avoir de ces affaires qui, toutes, laissent transparaître un cynisme pour le moins déconcertant face à la démesure des révélations : 7  milliards de dollars de placements financiers issus du trafic de drogue, une paille ! Juré, le patron d’HSBC, Paul Thurstor, la main sur le cœur, l’a promis, sa banque va fermer les comptes de sa filiale mexicaine réfugiée dans les îles Caïmans.

Alors, que dire des 28 000 transactions douteuses alimentant des réseaux terroristes, des échanges illégaux avec l’Iran ? David Bagley, le responsable de ces transactions internationales a démissionné et, auditionné par le Sénat américain n’a-t-il pas déclaré, ingénu, qu’il s’agissait là «de défaillances d’envergure» et donc que «le moment est venu (pour lui) que quelqu’un d’autre soit le patron des transactions». Bref, en des termes plus crus, démerdez-vous, je m’en lave les mains d’autant que le Crédit Suisse, ABN, Amro, la Lloyds ont connu les mêmes «défaillances». Aux dernières nouvelles, tout ce beau monde serait prêt à aligner le montant d’une amende d’un milliard de dollars que verseraient leurs établissements financiers. Car l’Etat fédéral ne veut que sa part de racket, pas question de condamnation pénale, d’ailleurs aucun banquier ne s’est jusqu’ici retrouvé à l’ombre. Rapacité et impunité semblent bien être les deux mamelles des spoliateurs. Mais, n’y aurait-il pas dans cette arène de crabes, des hommes vertueux ?  

6 – Des professeurs de vertu impuissants, aveugles ou corrompus ?

Obama n’a-t-il pas déclaré qu’il allait discipliner les «fats cats» (les rapaces) ? Un rapport de 3 200 pages et nombre de mesures à prendre en ce sens et, qui plus est, aboutissant à la loi Dadd Frank, ce n’est pas rien ! Las ! Elle est promulguée depuis 2 ans mais reste … inappliquée. La toute puissance des lobbys de Wall Street nous dit-on ! Et notre aimable Michel Barnier, lui, le Commissaire européen chargé de scruter la moralité du marché intérieur, il n’a rien vu des manipulations du Libor et de l’Euribor. Le 9 juillet dernier, il déclarait encore ne pas savoir si les banques françaises étaient impliquées. Certes, certains lui sauront gré de s’être écrié «C’est une trahison» et se rassureront de savoir que ses services vont conduire «une étude sur plusieurs mois sur les indices des marchés afin d’examiner s’il est opportun de les placer (éventuellement !) sous la tutelle des régulateurs».  Mais, que faisaient-ils jusqu’ici pour être aveugles à ce point ? Des expertises pour mesurer les efforts accomplis par les Etats membres en matière de lutte contre le blanchiment d’argent sale et de financement du terrorisme[7] ? D’ailleurs, l’organisme européen spécialiste nous rassure : le Vatican vient d’être sorti de la liste des Etats sans foi ni loi. Mais «il peut toutefois mieux faire» disent les inspecteurs. On ne sait s’ils ont pu examiner le bien acquis de son patrimoine estimé à 5 milliards d’euros, encore moins s’ils ont pu pénétrer dans le donjon qui, au sein de la cité papale, à l’abri d’un mur de 6 mètres d’épaisseur, abrite 33 404 comptes secrets détenus officiellement par des prélats et différents ordres religieux. Ce dont on est sûr, en revanche, c’est qu’ils n’ont guère apprécié la nouvelle qui plombe la sérénité de leur analyse : la justice italienne vient en effet de saisir 22 millions d’euros de fonds secrets provenant de la Banque du Pape. Précipitamment, en toute urgence, le conseil d’administration des cardinaux qui la gère, s’est réuni pour licencier son banquier en chef, Ettore Gatti Fedeschi. Mal lui en prit, futé, l’ex homme de confiance papale pour qui l’on avait confectionné une image d’incorruptible, a placé des documents confidentiels en lieu sûr, déclarant : «Si on me retrouve  mort, c’est là qu’il faudra chercher le nom de mon assassin». La morale catholique est impitoyable depuis l’ère des bûchers ! Et nous, qui avions cru que c’en était fini depuis la fin des années de plomb (70-80) avec les montages scabreux abritant les comptes anonymes de la maffia et de la loge maçonnique P2 !

Quitte à y revenir, on vous fera grâce de l’opulence corruptrice qui règne parmi les gardiens des lieux saints de l’islam[8]. Les pétro-monarques ont de telles flatulences à jets continus qu’il vaut mieux s’en tenir à distance. Pour l’heure, mieux vaut s’intéresser à un personnage hors du commun, un mormon, se présentant entouré de toute sa famille, comme un parangon de vertu.

7 – Mitt Rommey, le candidat hors norme des spéculateurs

En termes euphémisés, ce fut (!) un spécialiste de la prise de participation dans des entreprises «cibles», celles qui sont en difficultés et appellent à l’aide. Depuis 1983, à la tête d’un fonds spéculatif, Bain Capital, il a su développer vis-à-vis de celles qui demandent du cash, une logique flamboyante de vautour. Il les dépouille jusque mort s’ensuive. De 1984 à 1999, son fonds spéculatif rapportait des rendements aux actionnaires de 88% l’an, loin des performances mirobolantes de 10 à 14% généralement pratiquées. Dans ce monde déréglementé, quoi de plus simple ! La recette : 1) On apporte du cash en participation dans ces «canards boiteux». 2) On surendette ces entreprises en leur faisant miroiter que ces investissements vont les relancer. 3) Les bénéfices de ces entreprises servent à rembourser l’emprunt souscrit par Bain Capital (son apport en cash). 4) On facture des honoraires, des commissions, des frais exceptionnels… 5) On dissimule tous ces apports dans un paradis fiscal pour éviter l’impôt. 6) On a le choix entre la City de Londres, le Luxembourg, les îles Caïmans, Jersey ou les Bermudes. 7) On convertit ces sommes en actions de l’entreprise pour en devenir propriétaire. 8) Ces actions rapportent des dividendes aux actionnaires. 9) L’entreprise une fois dépouillée, on la liquide.   

Ainsi fut faite la fortune de Mitt Rommey, un seul petit exemple franco-français : la fabrique de valises Samsonite et ses 200 salariés au chôme-dû. Après l’avoir coulé selon la méthode signalée et avoir acquis les brevets de fabrication, Bain Capital a ouvert une usine en Inde et utilisé les moules de fabrication française délocalisés. Estimation du pactole engrangé lors de cette opération de «sauvetage» : 50 millions de dollars. La morale ne dit pas si à cette occasion les larrons ont invoqué le coût du travail en France.

Mitt Rommey fut (!) aussi un spécialiste de l’évasion fiscale pour lui-même et ses clients. Les îles Caïmans ont sa préférence car, là-bas, le secret de l’identité de ceux qui y placent leurs avoirs est réputé pour être le mieux gardé. Désormais, candidat à la présidentielle états-unienne, il  n’aurait gardé pour lui-même que la gestion de 12 fonds spéculatifs sur les 138 sis aux îles Caïmans, laissant prospérer les autres au profit de Bain Capital. Il serait associé à des personnalités hors du commun, des oligarques russes et… à Benjamin Netanyahou. Sa dernière conquête est plus sulfureuse. Sheldon Adelion, l’empereur des jeux de Las Vegas et de Macao, 3ème fortune américaine, 13ème mondiale, du lourd ! Ce mécène pour l’aider dans sa campagne de propagande n’a pas hésité à lui signer deux chèques de 10 millions de dollars chacun, sans compter les contributions non divulguées, prétend le journaliste Sylvain Cypel. Fâcheux, le licenciement de l’un de ses associés qui vient de porter plainte contre lui, pour complicité avec le crime organisé à Macao et son organisation d’un réseau de prostitution au sein de ses hôtels de luxe.

8 – Appauvrissement généralisé ou (et) faillites en cascades

Toute cette pourriture n’est en fait qu’un symptôme d’un monde au bord de l’implosion. Sa logique de reproduction, celle de la «destruction créatrice» peut, sur les ruines, se permettre de se refaire. A  moins que l’appauvrissement généralisé, la précarité galopante lui opposent une autre logique, celle de l’affrontement des producteurs salariés au capital prévaricateur. Pour l’heure, l’on n’en voit que de timides prémisses et l’horizon de cette orgie d’accumulation est bien sombre. Si l’on en croit Martin Wolf, économiste, le recours massif au crédit[9] et à ses intérêts qu’accumulent les vautours de la finance est catastrophique. La dette privée aux USA est passée de 112% du PIB en 1976 à 296% en 2008. La grande affaire, selon lui, reste le désendettement du secteur privé, y compris des banquiers qui doivent se débarrasser des crédits pourris. Il n’entrevoit que deux solutions : la planche à billets à laquelle recourt de plus en plus la FED et demain la BCE, ce qui, immanquablement, produira «encore et encore» l’accroissement de l’endettement des Etats car, de fait, il s’agira, toujours et encore, de recapitaliser les banques. Il restera aux contribuables d’en assumer les frais en attendant une hypothétique embellie. L’autre solution, c’est de laisser faire, ce qui suscitera une cascade de faillites, la dépression. Toujours autant optimiste, cet économiste prétend «qu’une vague de crises souveraines et bancaires (est envisageable) en Europe». «Elle culminera dans le rétablissement des contrôles de changes et la désintégration de la zone euro».

Tous ces accapareurs qui trônent aujourd’hui sur des montagnes de dollars pourraient bien connaître demain des déconvenues fracassantes. Comme le souligne Karl Marx, le capital en jachère qui ne passe pas par le cycle de production n’a aucune valeur. Telle est la signification des crédits pourris. La surproduction immobilière, ces constructions qui ne se vendent pas, qui n’ont aucune valeur d’usage, ce n’est que de la destruction de capital qui, pour se régénérer, doit encore et encore exploiter la force de travail et diminuer d’autant le salaire socialisé. Jusqu’à quand ? «Dans toute cette affaire de spéculation, chacun sait que la débâcle viendra un jour, mais chacun espère qu’elle emportera son voisin après qu’il aura lui-même recueilli la pluie d’or au passage et l’aura mise en lieu sûr. Après moi, le déluge»[10]

Gérard Deneux – le 25 juillet 2012

Mieux vaut être un banquier voleur qu’un voleur de banque…

Notre République est exemplaire pour les petits malfrats, et bonne pour les grands escrocs en costume trois pièces. Le reportage de Florence Aubenas[11] sur l‘itinéraire de Philippe El Schannawy est éloquent. C’est l’histoire d’un petit franco-égyptien abandonné par ses parents à l’âge de 15 ans. Sans ressources, avec ses copains, il braque les banques et, même trois fois la même agence, c’est leur passion. Ce petit voyou, pour 6 millions de francs dérobés, écope de la perpétuité, dans les années 70, sans que l’on ne lui reproche aucun crime de sang. Pour avoir à plusieurs reprises ridiculisé la police et les banquiers, on lui inflige une peine d’élimination et le titre de Détenu Particulièrement Signalé (DPS). En 1990, on lui accorde la conditionnelle, lui qui, en prison accumule des diplômes, «une culture hors du commun», en profite pour se faire la belle. Un an et demi après il est de nouveau arrêté en possession de quelques cartes de crédits volées. Mis à l’isolement, déplacé les chaînes au pied de prison en prison (28 en 20 ans !), il s’obstine à demander une machine à écrire, fait la grève de la faim, subit 8 fouilles par jour, craque. Il est jeté en psychiatrie pendant 5 ans. Il s’en échappe en 2004 pour ne pas finir en légume. Il est repris 11 mois plus tard et écope du minimum, 2 ans de plus. Le Parquet, dans sa soif de justice, fait appel. Les deux deviennent 16. Il devrait être libéré en 2032 sans avoir attenté à la vie de qui que ce soit. Depuis 2 mois, il est en grève de la faim, il a perdu 17 kilos. La mort est sa dernière liberté.

On rêve de voir tous les banquiers voleurs subir les mêmes peines.

GD



[1] Dans un article du Monde du 17 juillet. Economiste et anthropologue, il a écrit un livre prémonitoire «La crise du capitalisme américain» édition la Découverte
[2] Magnat de la presse poubelle britannique impliqué dans des écoutes, chantages, corruption de la police, etc.
[3] Cinq banques ont été nationalisées afin que les contribuables les renflouent : la Northern Rock, Halifax Bank, la Lloyds, Royal Bank et Brandford et Bingley : coût de l’opération = 160 milliards d’euros
[4] Euribor. Le taux interbancaire est calculé de manière similaire au Libor. Il ne concerne que la zone euro. Il est établi sur la base d’un panel de 57 banques.
[5] Lire l’article-reportage d’Yves Eudes dans le Monde du 14/15 juillet 2012
[6] Le Capital tome 2 – éditions sociales p. 126
[7] Source article de Pierre Ridet le Monde du 20 juillet
[8] Lire «Or noir, Maison Blanche» de Robert Baer – édition Folio  
[9] Son éditorial reproduit dans le Monde du 17 juillet. C’est un partisan du système qui déplore ses avanies et son irrationalité.
[10] Le Capital – tome 1 – éditions sociales p. 264
[11] Le Monde du 17 juillet 2012